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Revue juridique et politique de l’Union française


François Luchaire
“Les institutions politiques et administratives
des Territoires d’Outre-mer après la Loi Cadre”

Revue juridique et politique de l’Union française. Vol. 12. 1958, pp. 221-294


I. — Statut constitutionnel

1. — Le régime politique antérieur à 1946.

Les colonies devenues aujourd’hui des territoires d’outre-mer n’avaient pas de vie politique au sens moderne du mot, car aucune élection politique n’y était organisée. Seuls, le Sénégal (décret du 12 août 1885) et la Nouvelle-Calédonie (décret du 2 avril 1885) conservaient un Conseil général ; ceux de l’Océanie (décret du 28 décembre 1885) et de Saint-Pierre-et-Miquelon (décret du 2 avril 1885) furent éphémères. Seules les quatre communes de plein exercice du Sénégal (Dakar, Saint-Louis, Rufisque et Gorée), les deux communes de Saint-Pierre et de Miquelon-Langlade, celles de Nouméa (Nouvelle-Calédonie), de Papeete et d’Uturoa (Polynésie) avaient un Conseil municipal élu. Enfin, seul le Sénégal était représenté par un député au Parlement français. Les colonies étaient donc administrées par les Gouverneurs et Gouverneurs généraux sous l’autorité du Gouvernement représenté d’abord par le Ministre de la Marine, puis par le Ministre des Colonies, devenu Ministre de la France d’outre-mer.
Toutefois, chaque chef de territoire était assisté d’un Conseil privé (appelé Conseil d’Administration à Madagascar, Côte des Somalis, ainsi qu’à Saint-Pierre-et-Miquelon après la suppression du Conseil général) et chaque chef de groupe de territoires était assisté d’un Conseil de Gouvernement. Ces organes — purement consultatifs — se composaient essentiellement de hauts fonctionnaires, mais comprenaient au moins deux notables qui, bien que discrétionnairement choisis, assuraient certaine liaison aux échelons territoriaux les plus elevés entre l’administration et les administrés.

2. — Les principes constitutionnels.

La Constitution de 1946 a voulu créer une vie politique propre à chaque territoire, afin de satisfaire à la promesse contenue dans le dernier paragraphe du Préambule qui dispose que « fidèle à sa mission traditionnelle, la France entend conduire les peuples dont elle a pris la charge à la liberté de s’administrer eux-mêmes et de gérer démocratiquement leurs propres affaires.
La Constitution envisageait la réalisation de cette promesse selon des modalités d’apparence contradictoire, mais qui cependant, trouvent leur conciliation dans le principe d’évolution qu’elle consacrait également (art. 75).

1° L’existence de la collectivité territoriale que constitue chaque territoire d’outre-mer est reconnue par l’article 85 de la Constitution. Mais elle est reconnue dans le cadre de la République une et indivisible au même titre que l’existence d’un département ou d’une commune. Par conséquent, le territoire d’outre-mer ne peut devenir un Etat membre d’une République française devenue fédérale, car cela serait contraire au dogme de l’unité et de l’indivisibilité de la République. Mais ce qui distingue la commune et le département d’une part, du territoire d’outre-mer d’autre part, c’est que le régime juridique des premiers est uniforme, tandis que chaque territoire peut, et même doit, avoir un régime juridique distinct, car « les territoires d’outre-mer sont dotés d’un statut particulier tenant compte de leurs intérêts propres dans l’ensemble des intérêts de la République » (art. 74). Le particularisme, ou pour employer une formule utilisée pour l’Algérie, la « personnalité » de chaque territoire est donc reconnue.

2° Mais le « statut particulier » de chaque territoire doit respecter certains autres principes constitutionnels. Le premier de ces principes est issu du passé et fut exigé par le Gouvernement de l’époque qui en faisait une nécessité d’Etat. Il est contenu dans l’article 76 qui dispose « que le représentant du Gouvernement dans chaque territoire ou groupe de territoires est le dépositaire des pouvoirs de la République. Il est le chef de l’administration du territoire, il est responsable de ses actes devant le Gouvernement ». Le deuxième de ces principes est largement tourné vers l’avenir et contredit le premier. En effet, chaque territoire (art. 77) et chaque groupe de territoires (art. 78) doit être librement administré (art. 87) par une Assemblée élue, dont les décisions doivent être exécutées par son président.

3° L’article 75 de la Constitution, en reconnaissant le principe d’évolution, permet de concilier ces deux principes, car il permet de modifier progressivement la notion même d’administration territoriale, en distinguant les affaires propres au territoire qui peuvent être remises à des élus et les affaires communes à l’ensemble de la République qui ne peuvent échapper aux organes centraux de celle-ci et à ses représentants dans les territoires. En 1946, en raison de l’absence de vie politique qui caractérisait les territoires d’outre-mer, cette distinction était impossible et l’administration ne pouvait être dirigée que par le représentant du Gouvernement, le respect littéral de l’article 76 s’imposait ; mais une fois les élites politiques dégagées et formées à la vie administrative, le principe de self-administration contenu dans les articles 77, 78 et 87 de la Constitution devait prendre toute sa valeur.

4° Enfin, de la Constitution ressort une quatrième règle qui concerne cette fois la procédure. C’est la loi — et non le décret — qui doit régir à l’avenir tout ce qui concerne « l’organisation politique et administrative » des territoires (art. 72), leur « statut particulier », leur « organisation intérieure » (art. 74), leur modification statut (art. 75), leurs Assemblées élues (art. 77 et 78), ainsi que leur représentation au Parlement (art. 79) . La consultation de l’Assemblée de l’Union française et de l’Assemblée territoriale intéressée est obligatoire pour tout ce qui concerne leur statut (art. 74 et 75).

3. — L’application des règles constitutionnelles.

Ainsi, d’après la Constitution, chaque territoire devait être doté d’un statut particulier faisant du représentant du Gouvernement le chef de l’administration, mais permettant de confier progressivement à des Assemblées élues la gestion des affaires propres du territoire. Comment la Constitution fut-elle observée, tant par la jurisprudence que par le législateur ?

1° Aucun statut au sens formel du mot n’est intervenu, c’est-à-dire qu’aucune loi prise après les avis requis par les articles 74 et 75 n’a défini le « statut particulier » d’un territoire d’outre-mer quelconque. On aurait donc pu se demander si, faute de ce statut particulier qui caractérise le territoire d’outre-mer, les colonies étaient vraiment devenues des territoires d’outre-mer. La Cour de Cassation a très justement observé que les diverses lois sur l’élection aux Assemblées parlementaires et à l’Assemblée de l’Union française ont placé dans la catégorie des territoires d’outre-mer toutes les colonies qui n’ont été transformées ni en départements d’outre-mer ni en Etats (Crim., 18 décembre 1952, Bull. Crim., p. 521, 18 avril 1953, ibidem, p. 207). Toutefois, elle estime qu’en l’absence du statut particulier prévu par l’article 74, les règles antérieures à la Constitution restent en vigueur tant qu’elles n’ont pas été régulièrement abrogées par des textes nouveaux (Crim., 24 novembre 1949, Rec. Penant 1950, p. 96; 18 décembre 1952 et 3 mars 1954, tous deux rapportés, Rec. Dalloz 1956, p. 785, note Luchaire).

2° Par contre, les Assemblées prévues par la Constitution ont été établies. Les Assemblées territoriales furent, avant la mise en vigueur de la Constitution, instituées par décret (décrets du 25 octobre 1946). Le Gouvernement s’inspira alors de la loi du 10 août 1871 sur les Conseils généraux. Ces premières Assemblées territoriales furent donc essentiellement des Assemblées administratives. Mais, en fait, leurs tâches administratives étaient plus vastes que celles des Conseils généraux, car une collectivité départementale n’a que peu de services publics et ne peut exiger beaucoup d’impôts d’un contribuable qui a dû déjà verser les impôts d’Etat. Or, dans les territoires d’outre-mer il n’y a aucun impôt d’Etat et il n’y avait que très peu de services publics d’Etat. Les Assemblées territoriales étaient donc maîtresses de toute la fiscalité et intervenaient au moins par le vote du budget dans presque tous les services publics. Elles étaient, de plus, consultées dans des matières (état civil, loyer, etc … inconnues des Assemblées départementales. La vie politique territoriale s’est donc rapidement étendue à un secteur extrêmement large.
Une vie politique municipale importante fut en même temps développée dans les centres urbains qui furent érigés en communes mixtes ou de moyen exercice (Conseil municipal élu, maire nommé) ; leur gestion satisfaisante permit à la loi du 18 novembre 1955 de les transformer en communes de plein exercice, analogues aux communes métropolitaines. A ces mesures, il faut ajouter l’augmentation constante du nombre des députés africains à l’Assemblée nationale et l’extension progressive du suffrage à tous les citoyens et même à des catégories d’individus qui, dans la Métropole, ne sont pas électeurs (mineur acquittant l’impôt, femme de moins de 21 ans ayant deux enfants, etc. …). En 10 ans, la participation des élus devient effective à tous les échelons de l’administration de leur territoire.
La Constitution ne fut donc pas appliquée dans un esprit d’immobilisme, mais au contraire dans le sens du mouvement.
Mais ce mouvement même exigeait une réforme d’ensemble des structures et conduisit à compléter — pour ne pas dire à remplacer — le statut constitutionnel par un statut législatif.

II. — Le statut législatif

4. — La nécessité d’une réforme

L’application de la Constitution aboutissait à un résultat boiteux à bien des points de vue. Les élus prenaient de grandes décisions concernant leurs territoires, mais ces décisions étaient exécutées par de hauts fonctionnaires qui n’en étaient pas responsables devant eux mais devant le Gouvernement. Les premiers n’avaient donc pas à supporter la responsabilité de leur décision. Les seconds se trouvaient placés dans une situation inconfortable entre les élus et le Gouvernement et se demandaient à propos de chaque service public s’ils devaient se conformer aux désirs de l’Assemblée territoriale qui en votait le budget ou du Gouvernement qui en avait la direction théorique.
Mieux valait par conséquent distinguer clairement les services publics propres aux territoires de ceux intéressant l’Etat, pour remettre les premiers à la direction effective des élus et réserver les seconds au Gouvernement et à ses représentants. La première initiative d’une réforme de ce genre fut l’oeuvre du Ministre de la France d’outre-mer, Louis Jacquinot, dans un discours prononcé devant le grand Conseil à Dakar au mois d’avril 1954. Mais après son départ du Ministère de la France d’outre-mer (juin 1954) et pendant deux ans, ces réformes ne dépassèrent pas le stade des études, car il apparut nécessaire de les accompagner d’autres mesures aussi essentielles : suffrage universel et généralisation du collège unique, extension des compétences des Assemblées élues, nouvelle définition des rapports entre les territoires groupés et les groupes de territoires, réforme de la fonction publique accélérant l’« africanisation des cadres », etc…
Après les élections du 2 janvier 1956, cet ensemble apparut d’une telle ampleur — et aussi d’une telle urgence — que pour les réaliser le Parlement utilisa une procédure sans doute nécessaire, mais d’une constitutionnalité discutable, celle de la loi-cadre.

5. — La procédure de la loi-cadre.

Le statut actuel des territoires d’outre-mer est un statut législatif,car il est essentiellement l’oeuvre du législateur et ne peut être modifié que par lui. Mais la procédure nouvelle et curieuse qui fut utilisée laissa un pouvoir considérable au Gouvernement. Ce dernier,animé dans ce domaine par le Ministre de la France d’outremer Deferre, qu’aida le Ministre Houphouet-Boigny, eut ainsi la possibilité et le mérite de mener cette oeuvre immense à son terme.

1° Cette procédure consiste en trois opérations successives : En premier lieu, la loi du 23 juin 1956 a fixé les cadres des nouveaux statuts. En second lieu, des décrets qui devaient être signés avant le 1er mars 1957 ont précisé ces statuts, mais la loi prévoyait deux catégories de décrets. Les uns concernent les services publics et sont devenus exécutoires dès leur signature. Les principaux décrets ainsi intervenus furent ceux du 3 décembre 1956, relatifs à l’organisation des services publics et à la définition des services de l’Etat et portant énumération des cadres de l’Etat. Les autres ayant trait à l’organisation administrative des territoires n’étaient pas aussitôt publiés, mais devaient simplement être déposés su:r la tribune du Parlement. Ces deux catégories de décrets pouvaient modifier la législation existante.
En troisième lieu, ces deux catégories de décrets furent soumises à l’examen du Parlement; l’Assemblée de l’Union française eut 15 jours pour émettre son avis et le Parlement 4 mois prolongé de 15 jours par la loi du 19 juin 1957 pour tenir compte d’une crise ministérielle pour les examiner. A l’expiration de ces délais, les premiers décrets devenaient définitifs et les seconds entraient en vigueur, avec les modifications que le législateur avait pu leur apporter. En fait, tous ces décrets furent assez sensiblement modifiés par le Parlement, mais ils ont conservé leur forme de décret et ils furent publiés (décrets du 4 avril 1957 pour la définition des servicés publics de l’Etat et l’organisation des services publics et pour l’organisation de Madagascar, de l’A.O.F. et de l’A.E.F. et décrets du 22 juillet 1957 pour l’organisation des autres territoires) avec les modifications prises « après décision du Parlement ». Toutefois, s’ils conservent leur forme de décret, l’habilitation donnée au Gouvernement par la loi du 23 juin 1956 ayant pris fin le 31 mars 1957, ils ne peuvent désormais être modifiés que par la loi.

2° Trois critiques peuvent être adressées à cette procédure :

a) En premier lieu, contrairement aux articles 74 et 75 de la Constitution, les Assemblées territoriales ne furent à aucun moment consultées.
b) En second lieu, les décrets portent sur des matières réservées par la Constitution au Parlement (attributions des Assemblées par exemple). Certes, c’est l’approbation expresse ou implicite du Parlement, qui leur donne leur force définitive; mais lorsque l’Assemblée nationale et le Conseil de la République n’ont pu se mettre d’accord dans le délai prévu pour rejeter ou modifier le texte gouvernemental, celui-ci s’impose; un décret peut donc être imposé contre la volonté de l’Assemblée nationale.
c) Enfin, cette procédure donne au Conseil de la République des pouvons égaux à ceux de l’Assemblée nationale, ce qui semble contraire à l’article 20 de Constitution.

Ces critiques, purement formelles, ne retirent d’ailleurs rien à l’opportunité des réformes intervenues.

6. — Les grandes lignes du nouveau statut

Les grandes lignes du nouveau statut sont déterminées par la loi-cadre elle-même. En premier lieu, celle-ci impose le suffrage universel (art. 10) et le collège unique (art. 12). En second lieu, elle assure aux Assemblées territoriales un pouvoir délibérant élargi pour l’organisation et la gestion des services territoriaux. En troisième lieu, elle prévoit un Conseil de Gouvernement dans chaque territoire et en sus, à Madagascar, des Conseils provinciaux. En quatrième lieu, dans les groupes de territoires, elle transforme les Gouvernements généraux en simples organismes de coordination.
En cinquième lieu, elle impose une distinction précise entre les services de l’Etat et les services territoriaux et entre les cadres des fonctionnaires de l’Etat et ceux des fonctionnaires territoriaux.
En sixième lieu, elle prévoit des institutions administratives décentralisées qui sont les Conseils de circonscription et les collectivités rurales qui s’ajoutent aux municipalités ; à l’exception du contentieux, c’est donc l’ensemble du droit administratif des territoires d’outre-mer qui se trouve ainsi bouleversé.
Le grand intérêt de cette réforme considérable se trouve dans la distinction des afiaires de l’Etat et de celles des territoires auxquelles s’ajoutent celles des collectivités locales. La détermination des affaires propres à ces dernières n’offre pas de particularité par rapport aux règles métropolitaines. Par contre, il convient de rechercher comment se répartissent les affaires entre l’Etat et les territoires.

III. — La distinction des affaires de l’Etat et des affaires de territoires.

7. — Les principes de répartition des matières et des services

Dans un Etat fédéral, la Constitution répartit les matières et les services en précisant le plus souvent les attributions des organes fédéraux et en laissant aux Etats membres toutes les autres attributions.
Les réformes de 1956 n’ont procédé ainsi que pour les services. En effet, le décret du 3 décembre 1956 modifié après décision du Parlement par celui du 4 avril 1957 énumère limitativement les services publics de l’Etat et décide que tous les autres services sont territoriaux.
Par contre, en ce qui concerne les matières, les décrets du 4 avril et du 22 juillet 1957 énumèrent les matières qui sont de la compétence des organes territoriaux et permettent d’en déduire que toutes les autres matiè:res relèvent des organes ou des agents de l’Etat. Le résultat n’est pas heureux, car des matières sont de la compétence d’une collectivité (Etat ou territoire),tandis que les services chargés d’appliquer la réglementation concernant ces matières relèvent de l’autre collectivité : ainsi, le service des mines est territorial (ou interterritorial en A.O.F. et A.E.F.), tandis que la législation minière est une législation d’Etat. Inversement, la procédure civile, le régime pénitentiaire, l’enfance délinquante sont réglementés par les Assemblées locales, alors que le service judiciaire est un service d’Etat. Le service des douanes est un service de l’Etat qui cependant ne fixe pas les droits.
Cette discordance n’a rien d’exceptionnel dans notre droit ; c’est ainsi que le personnel de la police d’Etat exécute les décisions des autorités municipales (art. 105 de la Constitution), mais appliquée aux territoires elle rend plus difficile l’application du préambule constitutionnel qui leur garantit la gestion démocratique de leurs propres affaires. En fait, les domaines dans lesquels l’Etat agit seul sont très réduits, ceux dans lesquels le territoire agit seul sont beaucoup plus nombreux ; mais surtout, il existe une vaste zone dans laquelle les compétences sont partagées.

8. — Les compétences exclusives de l’Etat

L’Etat ne dispose à proprement parler d’aucune compétence absolument exclusive. Toutefois, l’intervention du territoire n’est que secondaire dans certains domaines que l’on peut donc considérer comme réservés à l’Etat, car la décision lui incombe en toute liberté. Ceux-ci sont au nombre de cinq :

1. L’Etat exerce l’intégralité des compétences diplomatiques. Toutefois, les conventions commerciales intéressant un territoire ne peuvent être passées par le représentant du Gouvernement métropolitain dans le groupe de territoires ou le territoire non groupé, sans l’avis du ou des Conseils de Gouvernement intéressés.
2. L’Etat exerce l’intégralité des compétences propres à assurer la défense extérieure et intérieure des territoires, ce qui lui assure la direction des forces armées et de la gendarmerie, des services de la défense passive, du chiffre et de la mobilisation. Toutefois, les territoires peuvent organiser des corps de garde-cercle ou unités similaires.
3. L’Etat règle seul le régime et les services des changes du trésor et du contrôle financier. Les instituts d’émission et les offices des changes sont des établissements d’Etat. Toutefois, les territoires sont représentés dans certains de ces organismes.
4. L’Etat règle seul tout le droit civil applicable aux citoyens de statut civil français. Toutefois, les Assemblées territoriales de la Nouvelle-Calédonie et de l’Océanie peuvent aménager le régime des biens et droits fonciers, à condition de respecter le Code civil. De plus, la réglementation des loyers incombe aux territoires et ceux-ci peuvent obliger à s’assurer les personnes dont la responsabilité est susceptible d’être engagée en vertu des articles 1382 à 1386 du Code civil.
5. L’organisation administrative des territoires et la tutelle des collectivités décentralisées incombe à l’Etat. La Constitution place dans le domaine réservé à la loi l’organisation des territoires et des communes (art. 74 et 86) et réserve les pouvoirs de tutelle aux délégués des gouvernements (art. 88). Toutefois, les Assemblées territoriales doivent être consultées pour l’organisation intérieure du territoire et la création des communes de plein exercice. De plus, si la tutelle qui pèse sur les collectivités rurales est librement organisée par le représentant du Gouvernement, par contre la création et les mesures complémentaires d’organisation de ces collectivités sont décidées par les autorités territoriales. Enfin, une Assemblée est consultée avant toute dissolution du Conseil de Gouvernement investi par elle.

9. — Les compétences exclusives des territoires

Les territoires disposent de compétences exclusives dans cinq grands secteurs :

1. Ils sont d’abord maîtres de leurs moyens d’action. Ils ont donc une compétence totale en matière fiscale. Leurs droits en cette matière sont d’autant plus absolus qu’il n’existe aucun impôt d’Etat. Ils réglementent librement tout ce qui concerne leur domaine public ou privé, y compris les eaux non maritimes qui, outre-mer, font toutes partie du domaine public. Ils organisent leurs propres services publics et réglementent leur fonction publique et les conditions des marchés publics.
2. Ils réglementent et protègent la plupart des activités locales : agriculture, commerce et transport intérieur, professions libérales, caisses d’épargne ; ils peuvent soumettre à autorisation l’exercice par les étrangers de certaines professions, même industrielles.
3. Ils ont une compétence absolue pour tout ce qui concerne l’aide à l’individu, à sa santé, sa culture et ses loisirs. En effet, sont des affaires territoriales : l’assistance, la santé publique (y compris la réglementation des boissons et la protection des aliénés), les activités cultuTelles, le sport, la chasse, la pêche et le tourisme. Toutefois, la réglementation des fraudes alimentaires leur échappe et le code de déontologie médicale doit être respecté.
4. L’urbanisme et le logement sont également des affaires territoriales, ainsi que la réglementation des loyers et la protection des monuments et sites.
5. Enfin, les territoires ont pleine compétence pour tout ce qui concerne les coutumes, leur constatation, leur évolution et même leur application par les tribunaux de droit local.
Dans tous ces domaines, les territoires ne sont pas liés par la législation et la réglementation antérieure 1 aux réformes de 1957, car ils peuvent librement les modifier. Par contre, ils ne peuvent aller à l’encontre des conventions internationales. De plus, l’Etat dispose d’un certain nombre d’offices nationaux qui, dans ces domaines, apportent leur aide aux territoires, mais seulement dans la mesure consentie par ceux-ci (Offices et Instituts de recherche scientifique, Office national anti-acridien). Enfin, dans certains de ces domaines, les territoires doivent respecter une réglementation d’ensemble. Il en est ainsi pour le code du commerce, le code maritime, les codes de déontologie ; les règles générales des marchés publics, la loi du 1er mars 1888 sur la pêche, la législation et la réglementation sur les assuran.ces, ainsi que celles relatives au soutien à la production.

10. — Les compétences partagées entre TEtat et les territoires.

Dans cinq grands secteurs également on oberve un partage d’attributions entre l’Etat et les territoires.

1. La justice est essentiellement un service public de l’Etat. Toutefois, les territoires réglementent la justice de droit local, la procédure civile, le régime pénitentiaire, l’enfance délinquante et abandonnée, le statut des auxiliaires de justice, comme d’ailleurs de toutes les professions libérales.
2. La police administrative étant un instrument de sécurité générale est confiée à un service d’Etat (à l’exception de la police municipale et rurale), mais ce service applique de nombreuses décisions de police prises par les autorités territoriales, notamment en matière de santé publique et de lutte contre les diverses endémies. Inversement, bien que les communications intérieures relèvent du territoire, tout ce qui concerne la police de l’air et de la mer incombe à l’Etat.
3. L’enseignement est un service territorial, à l’exception de l’enseignement supérieur qui devient service d’Etat, mais l’Etat fixe les programmes et modalités d’examens à tous les degrés, ainsi que les qualifications requises pour enseigner.
4. Le commerce et les communications (télécommunications,radiodiffusion, etc…) extérieurs sont une affaire d’Etat, mais le territoire fixe les droits de douane et peut établir un conditionnement à l’exportation. De plus, il est consulté sur l’orientation des programmes de radio et leur répartition horaire, il intervient dans la gestion des services des P.T.T. et les chemins de fer 2.
5. Enfin, le développement économique et social des territoires donne lieu à un partage encore plus complexe :

  1. Le plan d’équipement comprend deux sections : l’une, la section générale ne dépend que de l’Etat, l’autre la section d’outre-mer est établie par voie d’accord entre le territoire bénéficiaire et l’Etat, car c’est lui qui, pour la plus grande partie, en finance l’exécution.
  2. La législation minière relève de l’Etat qui dispose des services de la carte géologique et du commissariat à l’énergie atomique. Mais les modalités d’application de la législation minière ainsi que le service des mines lui-même relèvent des territoires. Quant aux titres miniers, il faut faire certaines distinctions. Les permis de recherche A qui portent sur de grandes étendues et s’accompagnent d’une convention, sont délivrés par le représentant de l’Etat après avis du territoire; les permis de recherche B sont délivrés par les autorités territoriales.
  3. La législation sociale contenue dans le code du travail est l’oeuvre de l’Etat et l’Inspection du travail est un service d’Etat, mais les territoires sont consultés sur les modalités d’application et le corps des « contrôleurs du travail » est un cadre territorial.
    De même, si la législation d’ensemble sur la mutualité émane de l’Etat, les territoires prennent les mesures d’application.

Chapitre Premier La gestion des affaires de l’Etat

II. — La centralisation politique et ses limites pratiques

La réforme réalisée par la loi-cadre et les décrets d’application est dans une certaine mesure centralisatrice, car certains services publics qui étaient auparavant considérés comme territoriaux parce qu’ils étaient à la charge des territoires, sont devenus des services d’Etat à la charge de son budget général. C’est pourquoi quelques protestations se sont élevées du côté des élus d’outre-mer, moins sensibles à l’économie que ce transfert procurait à leurs territoires qu’à la limitation ainsi apportée à leur autonomie. Leur critique était à la fois vraie et fausse. Elle était fausse parce que avant la loi-cadre les élus qui ne pouvaient s’immiscer directement dans aucun service public n’exerçaient qu’un contrôle budgétaire assez illusoire en raison de la liste assez longue des dépenses obligatoires. La loi-cadre ne leur faisait donc pas perdre grand chose sur les services désormais considérés comme d’Etat, alors qu’elle leur donnait la réalité des pouvoirs sur les autres services. Sur un plan plus pratique, la critique était justifiée car l’administration, soucieuse d’éviter des conflits politiques, admettait en fait bien souvent l’intervention des élus sur l’ensemble des services territoriaux.
Mais ainsi appréciée, la critique perd beaucoup de sa portée pour deux raisons. En premier lieu, le même souci d’éviter les conflits politiques peut très bien amener l’administration à accepter l’intervention pratique des élus sur l’ensemble des services, y compris ceux de l’Etat. L’influence au Parlement et au Gouvernement français de certains « leaders » d’outre-mer transforme ce risque en certitude.
En second lieu, l’ « africanisation des cadres » garantit au territoire que les agents des services de l’Etat seront désormais en majorité recrutés dans le territoire.
Eux aussi subiront donc fortement l’emprise des nécessités politiques locales. C’est pourquoi la centralisation politique qu’a voulu réaliser la loi-cadre est très théorique. Dans les faits, elle sera illusoire tant que le régime politique français n’aura pas été modifié dans le sens d’un affermissement des institutions centrales et de leur autorité sur leurs agents par une plus grande stabilité du Gouvernement et une autre conception du contrôle parlementaire. Les affaires de l’Etat n’échappent pas totalement aux territoires qui interviennent d’abord dans la vie courante des services de l’Etat et ensuite auprès de ses plus hautes instances grâce à leurs parlementaires. Cette considération ne doit jamais être perdue de vue quand on examine comment les organes centraux (Assemblées constitutionnelles, gouvernement) et leurs représentants dans les territoires d’outre-mer y assurent la gestion des services publics de l’Etat.

Section Première. — Les organes centraux

1. — Les Assemblées constitutionnelles

12. — Le rôle du Parlement

Le Parlement intervient dans les territoires d’outre-mer en faisant la loi et en contrôlant l’action gouvernementale.

1 La Constitution réserve au Parlement les plus importantes mesures politiques et administratives ; statut et limites des territoires et groupes de territoires, régime électoral, composition et compétence de leurs Assemblées, conditions des élections au Parlement régime municipal, exercice de la citoyenneté, libertés publiques et législation criminelle.
Ces compétences s’ajoutent à celles que la Constitution confie au Parlement pour l’ensemble de la République (amnistie, composition de l’Assemblée de l’Union française, exercice du droit de grève, statut du Conseil économique, approbation de certains traités).
De plus, le Parlement a pris un certain nombre de lois qu’il n’entend pas laisser modifier par d’autres autorités, car elles contiennent des principes qui lui paraissent fondamentaux. Il en est ainsi pour le code du travail (loi du 15 décembre 1952), l’établissement du suffrage universel et du collège unique (loi du 23 juin 1956). Les interventions du législateur dans d’autres domaines ne restent dans ses attributions que dans la mesure où le Parlement n’a pas étendu à ces domaines les pouvoirs du Gouvernement ou des Assemblées territoriales.

2. L’exercice du contrôle parlementaire complète l’intervention du Gouvernement. Certes, si plusieurs Gouvernements ont été renversés à propos des affaires d’Algérie, aucun ne l’a été à propos des territoires d’outre-mer. Mais l’inflexion de la politique gouvernementale à l’égard des territoires d’outre-mer s’effectue lorsque le Gouvernement recherche les voix des élus d’outre-mer à l’occasion d’abord des votes d’investiture, et ensuite des votes de confiance ou de censure, quel que soit l’objet sur lesquels portent ceux-ci.
Par suite, cette inflexion se fait dans le sens voulu par la majorité des élus d’outre-mer. C’est certainement grâce à leur action persistante si les investissements publics dans les territoires d’outre-mer ont pu atteindre leur niveau actuel.

13. — Le rôle de l’Assemblée de l’Union française

Le rôle de l’Assemblée de l’Union française a subi une très nette évolution. En effet, il consistait d’après la Constitution à associer les élus d’outre-mer à des décisions concernant leurs territoires et qui étaient prises par les organes de la Métropole.
Elle continue certes à exercer cette fonction et elle est consultée sur les projets de loi concernant le statut et l’organisation intérieure des territoires d’outre-mer, ainsi que sur les projets de décret réglementaire du Président de la République concernant spécialement les territoires d’outre-mer.
Mais dans la mesure où les organes métropolitains n’interviennent plus dans la gestion des affaires territoriales, l’Assemblée de l’Union française n’a plus, elle aussi, à intervenir.
Son autorité se manifeste cependant dans trois catégories de domaine:

  1. En premier lieu, elle donnera des avis dans les matières réservées au Parlement et au Gouvernement de la République. Par exemple, l’extension par décret aux territoires d’outre-mer des textes législatifs et même réglementaires applicables aux communes métropolitaines ne peut se faire sans son avis (loi du 15 novembre 1955, art. 6).
  2. En second lieu, elle donne son avis à l’occasion de certains arbitrages que la loi a réservés au Gouvernement. Ainsi les permis de recherche minière du type A sont accordés par décret pris sur avis de l’Assemblée de l’Union française en cas de désaccord entre l’Assemblée intéressée et le représentant du Gouvernement. De même les difficultés économiques et financières opposant deux territoires d’un même groupe seront réglées par la même procédure, après une tentative in:fructueuse d’une conférence interterritoriale (art. 17, décret D 0 458 du 4 avril 1957).
  3. En troisième lieu, elle donne son avis sur les mesures présentant un intérêt commun pour la Métropole et les territoires d’outre-mer. Son rejet de la Communauté européenne de Défense a eu une influence certaine sur le vote négatif de certains députés.

II. — Le Gouvernement

14. — La composition du Gouvernement et la répartition des compétences gouvernementales

1. La composition du Gouvernement reflète les préoccupations du Gouvernement à l’égard des élus d’outre-mer. Le chef du parti africain ayant le plus d’élus a tout naturellement une place de choix. Des postes de secrétaires d’Etat sont réservés à d’autres élus d’outre-mer. Il en résulte une répartition souvent délicate des compétences gouvernementales concernant les territoires d’outre-mer. C’est ainsi que le Ministre Hauphouet, quel que soit son rôle à l’intérieur du Gouvernement, se trouve associé aux mesures prises par le Ministre de la France d’outre-mer concernant l’application de la loi-cadre.

2. De plus, le Ministre de la France d’outre-mer n’est plus le seul à avoir compétence à l’égard de ces territoires. Certains ministres spécialisés exercent des compétences directes : le Ministre de la Défense nationale organise les troupes et la gendarmerie coloniale, le Ministre des Travaux publics est responsable de l’aéronautique civile d’intérêt général La ,recherche et l’exploitation des hydrocarbures et des substances utiles à l’énergie atomique dépendent d’organismes rattachés au ministère de l’Industrie ou à la Présidence du Conseil. Le Conseil supérieur de la Magistrature exerce les mêmes attributions dans la Métropole et dans les territoires d’outre-mer.

3. Enfin, les décisions qui engagent économiquement la Métropole à l’égard des territoires d’outre-mer ne peuvent être prises sans l’accord du Ministre à compétence économique intéressé; celles qui l’engagent pour les territoires d’outre-mer à l’égard des pays étrangers ou des organismes internationaux exigent l’accord du Ministre des Affaires étrangères. C’est dans ce cadre que doivent être compris l’organisation et le rôle du Ministère de la France d’outre-mer.

15. — Le Ministère de la France d’outre-mer

L’organisation du Ministère de la France d’outre-mer pose quatre problèmes très particuliers qui ont trait au rôle du Ministre à la spécialisation des bureaux et du personnel et à l’inspection des services.

1. Le rôle du Ministre de la France d’outre-mer s’est considérablement modifié :

a) Il n’a toujours eu que peu de pouvoirs de décision car d’une part, il ne peut engager la Métropole sans l’accord des autres Ministres intéressés et, d’autre part, les décisions engageant les territoires sont prises à l’échelon de ceux-ci ; le décret du 22 juillet 1957 a encore diminué ses pouvoirs de décision en en transférant une partie (remises de dette, fixation d’indemnité de déplacement, réseaux aériens d’intérêt local, énergie électrique, programmes d’enseignement du secoud degré, etc…), aux chefs de territoire ou de groupes de territoires. b) Mais il avait un pouvoir de contrôle très étendu : supérieur hiérarchique des représentants du Gouvernement dans les territoires, il contrôlait par leur intermédiaire tous les services publics fonctionnant dans ces territoires. Aujourd’hui, ce pouvoir de contrôle se réduit aux seuls services d’Etat, puisque les autres sont maintenant placés sous la responsahilité des élus. c) Toutefois, les représentants du Gouvernement dans chaque territoire restent les chefs de l’administration territoriale, bien qu’ils n’en aient plus la responsabilité ; en présidant le Conseil de Gouvernement qui en a la charge, ils exercent ce que nous appellerons une « magistrature d’influence ». Par leur intermédiaire, le Ministre de la France d’outre-mer possède un rôle d’impulsion qui peut être très important. Enfin, il se fera tout naturellement « l’avocat » des territoires d’outre-mer auprès des autres Ministres auxquels il s’adresse pour obtenir de la Métropole des concours en moyen financier ou en personnel.

2. Les bureaux du ministre doivent-ils être géographiquement ou techniquement spécialisés ? La première solution place à l’administration centrale des fonctionnaires connaissant mieux le territoire que les problèmes techniques; la seconde offrait l’inconvénient d’imposer des solutions trop uniformes à des territoires différents. Mettant fin à une série d’hésitations, le décret-loi du 30 octobre 1935 avait adopté une spécialisation technique qui laissait cependant au sein de la direction des affaires politiques quelques bureaux géographiquement spécialisés. Par suite, avec ses multiples directions ou services spécialisés, le Ministre de la France d’outre-mer offre l’aspect d’un véritable petit gouvernement. Ce petit gouvernement, aujourd’hui sans pouvoirs réels, est-il encore très satisfaisant ? L’éclatement du Ministère de la France d’outre-mer en directions ou même en secrétariats d’Etat géographiquement spécialisés est parfois réclamé ; ce serait, il est vrai, faire autant d’ambassades des territoires intéressés. Inversement, on peut aussi préconiser la transformation de ce ministère en un organe de coordination et d’animation, ses directions et services spécialisés étant directement rattachés aux ministères correspondants. Il existe une dernière solution consistant dans une réforme du Gouvernement — et peut-être de la Constitution — donnant à un vice-président du Conseil un pouvoir non seulement de coordination mais aussi d’impulsion de la politique commune à la Métropole et aux territoires d’outre-mer et d’arbitrage de leurs intérêts parfois différents.

3. Le personnel des bureaux doit-il être spécialisé dans l’administration centrale ou provenir des services extérieurs ? La première solution risque de rendre les fonctionnaires complètement étrangers à la réalité pratique des problèmes qu’ils traitent; la seconde risque d’amener au ministère des agents trop attachés à l’expérience nécessairement limitée qu’ils ont pu avoir au début de leur carrière. La deuxième solution a été choisie depuis la loi du 4 septembre 1942 qui a institué un cadre unique d’administrateurs de la France d’outre-mer, dans lequel l’avancement est conditionné par des séjours outre-mer. Le statut particulier de ces administrateurs a été fixé par le décret du 23 avril 1951. Aujourd’hui, les données de ce problème ont encore évolué et c’est le particularisme du cadre des administrateurs de la France d’outre-mer, issus de l’Ecole nationale de la France d’outre-mer, qui est critiqué. Les contacts incessants du Ministère de la France d’outre-mer avec les autres Ministères seraient plus faciles si tous les administrateurs sortaient de l’Ecole nationale d’administration. Mais surtout, les territoires d’outre-mer devenant de plus en plus autonomes, ne réclament plus de spécialistes des questions d’outre-mer qu’ils estiment connaître suffisamment, mais au contraire des techniciens non seulement de l’enseignement ou des travaux publics mais aussi de l’administration générale.

4. Le contrôle de l’administration locale doit-il être fait par des contrôleurs résidant localement ou par des inspecteurs n’effectuant que des missions ? Le premier système risque d’énerver l’action par un contrôle incessant ou de faire du contrôleur un administrateur actuel. Le deuxième risque de rendre illusoire le contrôle effectué au cours de missions trop rares ou trop rapides.

Après une longue évolution, le deuxième système a été préféré. Les inspecteurs de la France d’outre-mer assurent (arrêté du 18 mai 1913) le contrôle permanent de l’administration centrale et des missions d’inspection dans les territoires. Ces missions portent soit sur un point particulier, soit sur un thème général déterminé par le Ministre. Dans ce dernier cas, elles durent 6 à 8 mois et donnent lieu à des rapports communiqués pour annotation aux chefs des administrations contrôlées qui ne peuvent apporter aucune entrave aux investigations des inspecteurs. Ces rapports sont ensuite remis directement au Ministre avec un rapport d’ensemble établi par le chef de la mission. Mais de plus, dans les gouvernements généraux un directeur du contrôle financier et dans chaque territoire groupé un délégué de ce directeur (décret du 19 décembre 1952) vise les engagements de dépenses et contrôle les finances de toutes les collectivités ou entreprises publiques ou d’économie mixte (art. 2 de la loi du 27 avril 1951).

Section Il. — Les représentants du Gouvernement

1. — Leur statut

16. — Leur titre

Les représentants du Gouvernement portent des titres divers selon l’importance et l’entité dont ils dirigent l’administration.

1. Des Hauts-Commissaires sont placés à la tête de l’A.O.F., de I’A.E.F. et de Madagascar ; ils sont pris dans le cadre des gouverneurs généraux.

2. Des Gouverneurs sont les chefs des territoires autres que Madagascar et sont pris en principe dans le cadre correspondant.

3. Toutefois, le chef du territoire des Comores et celui des terres australes et antarctiques ont le titre d’ « administrateur supérieur » ; celui de Saint-Pierre-et-Miquelon le titre d’« administrateur ». Ils sont tous trois pris dans le cadre des administrateurs.

4. Enfin, dans chaque province malgache, le représentant du Gouvernement est pris parmi les administrateurs et a le titre de chef de province. Ils ont tous une double qualité car, d’une part ils représentent le Gouvernement et ont à cet égard le titre de « dépositaire des pouvoirs de la République » et d’autre part ils représentent dans la vie juridique l’entité dont chacun dirige l’administration et ont à cet égard le titre de chef de groupe de territoires, chef de territoire, chef de province ou, pour prendre une formule qui englobe ces trois qualités, « chef de l’administration ». Leurs deux qualités de « dépositaire des pouvoirs de la République » et de « chef de l’administration » doivent être soigneusement distinguées car, dans le premier cas ils agissent en tant qu’agent de l’Etat, dans le second en tant qu’agent d’une entité territoriale distincte. Malheureusement, les textes ne respectent pas toujours cette distinction. Dans chapitre cependant, ils ne seront envisagés que dans leur pre-qualité.

17. — Leur dépendance, leurs sujétions, leurs privilèges.

1. Les représentants du Gouvernement sont nommés et relevés discrétionnairement de leur fonction par décret en Conseil des Ministres. Le décret 3 doit être signé par le Président de la République (art. 30 de la Constitution). Aucune condition particulière n’est exigée pour être nommé dans le cadre des Gouverneurs et Gouverneurs généraux. On remarquera que les Gouverneurs et Gouverneurs généraux étant nommés par « décret individuel pris en Conseil des Ministres », le Gouvernement n’est pas tenu de réserver 66% des places disponibles aux originaires et aux fonctionnaires des territoires d’outre-mer. Mais le Gouvernement doit respecter ce pourcentage pour le cadre des administrateurs qui fournissent en fait la plus grande partie des Gouverneurs. Dans ce cadre (décret du 26 avril 1951) des Gouvemeurs et Gouverneurs généraux, l’avancement a lieu exclusivement au choix, le droit syndical n’est pas reconnu, les sanctions disciplinaires sont infligées après la seule formalité de la communication du dossier qui peut mentionner les opinions politiques,philosophiques ou religieuses des intéressés. Ceux-ci peuvent être mis en disponibilité dans l’intérêt du service avec traitement réduit d’au moins de moitié.

2. Ils ne peuvent dans leur territoire contracter mariage ou acquérir des propriétés ou participations financières sans l’autorisation préalable du Ministre. En revanche, ils ne peuvent faire l’objet d’une action en justice que dans la Métropole ; dans leur territoire, aucun jugement ne peut être mis à exécution contre eux.

II. — Leurs attributions en tant que dépositaire des pouvoirs de la République

18. — La qualité de dépositaire des pouvoirs de la République

1. L’expression « dépositaire des pouvoirs de la République » a succédé à celle de « dépositaire de l’autorité royale » ou de « l’autorité impériale ». Les ordonnances organiques de la Restauration (ord. des 21 août 1825 et 9 février 1827) donnaient au Gouverneur des pouvoirs correspondant à ceux que la charte constitutionnelle conférait au Roi (promulgation et exécution des lois, direction des forces militaires, sursis à l’exécution des décisions judiciaires, négociation avec les Gouvernements étrangers voisins, etc…). Cette qualité signifiait donc que le Gouverneur exerce, non pas les pouvoirs de la République, mais seulement du Gouvernement de la République. Aujourd’hui, elle a pris une précision nouvelle puisque le territoire administre les affaires territoriales par des organes propres. Le chef du territoire est un des ces organes, mais il agit alors en tant que chef de l’administration. L’expression « dépositaire des pouvoirs de la République » résume ainsi les attributions exercées par le représentant du Gouvernement au nom de celui-ci. Ces attributions ne sont nullement illimitées, mais au contraire déterminées par les lois et règlements.Toutefois, une tradition datant des ordonnances de la Restauration s’est formée et la qualité de dépositaire des pouvoirs de la République confère à son titulaire l’ensemble des attributions qui vont être précisées, même quand elles ne lui sont pas reconnues par un texte formel (Cass. Crim., 13 janvier 1905, Rec. Dareste 1905, p. 577).

2. L’article 76 de la Constitution confère cette qualité au représentant du Gouvernement dans chaque territoire ou groupe de territoires. La disjonctive « ou » pouvait prêter à discussion, d’autant plus qu’avant la Constitution les chefs de territoire groupé n’avaient pas cette qualité. Mais celle-ci est aujourd’hui attribuée à tous les représentants du Gouvernement que nous avons cités (n° 16). Toutefois, elle est conférée au chef de territoîre groupé et au chef de province malgache par « délégation permanente » du haut-commissaire sous l’autorité duquel ils sont placés (décret du 4 avril 1957). Ils exercent donc leurs pouvoirs sous l’autorité hiérarchique de ce haut-commissaire, bien que le décret du 4 avril 1957 précise que les chefs de territoires groupés sont responsables devant le Gouvernement dont ils reçoivent les instructions.

19. — Leurs attributions en matière législative et réglementaire

1. Les hauts-commissaires et les chefs de territoires non groupés assurent la promulgation des lois et décrets de la Métropole rendus applicables dans leurs territoires, ainsi que la publication des actes officiels pris à leur échelon.

2. Ils disposent du pouvoir réglementaire d’abord pour l’« exécution des lois et décrets » et peuvent assortir leurs arrêtés intervenus dans ce but de peine de 15 jours de prison et de 1 200 francs d’amende au maximum (décret du 3 mai 1945). Ils disposent encore du pouvoir réglementaire dans un but de police générale, car ils assurent le maintien de l’ordre public ainsi que la sûreté des personnes et des biens. Par contre, une partie de leurs pouvoirs de police spéciale a été transférée aux Assemblées. Ils ont cependant compétence en matière de chemin de fer, ravitaillement, presse, manifestations et réunions publiques, etc… Ils disposent enfin du pouvoir réglementaire pour l’organisation des services publics de l’Etat fonctionnant à leur échelon.

3. Les chefs de territoires groupés et les chefs de provinces malgaches assurent la publication des actes officiels pris à leur échelon ; ils exercent le pouvoir réglementaire dans la mesure des délégations du haut-commissaire dont ils dépendent. Ils en disposent également dans un but de police générale, car ils sont responsables du maintien de l’ordre public et dans les quelques matières de police spéciale (immeuble menaçant ruine par exemple) qui n’ont pas été transférées aux Assemblées.

20. — Leurs attributions en matière de défense et de relations extérieures

1. Les hauts-commissaires et les chefs de territoires non groupés assurent et coordonnent la défense des territoires de leur ressort. Ils ont le commandement supérieur et l’inspection générale de toutes armes. Toutefois, les décrets du 5 juillet 1951 ont institué trois zones de défense et chaque haut-commissaire dirige la défense d’une zone plus vaste que les territoires qu’il administre. La zone de l’Océan Indien comprend, outre Madagascar, les Comores, la Côte des Somalis, le département de la Réunion, ainsi que les terres australes et antarctiques (décret du 18 septembre 1956). Les deux autres comprennent respectivement l’A.O.F. Togo et l’A.E.F. Cameroun. Les responsables de la défense de ces deux dernières zones peuvent d’ailleurs être réunis en un Comité de Défense de l’Afrique centrale (C.O.D.A.C.).

2. Les mêmes autorités peuvent prononcer fétat de siège (décret du 4 avril 1957) en cas de péril imminent résultant d’une guerre étrangère ou d’une insurrection à main armée. Ils peuvent expulser les étrangers — mais non les Français — et ils statuent sur les demandes d’extradition.

3. En plus de leurs pouvoirs en matière d’extradition, les hauts-commissaires peuvent communiquer avec les représentants de la République française outre-mer, les autorités des pays étrangers en Afrique (et aussi en Asie pour le Haut-Commissaire de Madagascar) et les représentants de la République dans ces pays, les représentants consulaires des gouvernements étrangers régulièrement accrédités et dont la juridiction s’étend aux territoires de son ressort. Ils négocient après avis du ou des Conseils de Gouvernements intéressés avec ces autorités et représentants toutes conventions, notamment à caractère commercial, applicables à tout ou partie du ou des territoires de leur ressort dans la limite des instructions gouvernementales. Ils les concluent sous réserve de leur approbation par le Gouvernement de la République. Les chefs de territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon et en Côte des Somalis, en Nouvelle-Calédonie et des terres australes et antarctiques négocient lorsqu’ils y sont autorisés et dans les limites de ses instructions, toutes conventions commerciales ou autres. Le Gouverneur de la Nouvelle-Calédonie communique avec les gouvernements des pays et colonies de l’Australie, de la Mer des Indes, de la Malaisie, des Mexs de Chine, du Japon et de l’Océanie. L’administrateur supérieur des Comores communique avec les agents diplomatiques et consulaires de France dans l’Océan Indien et en Afrique orientale. Le chef du territoire de Saint-Pierre-etMiquelon et de la Côte des Somalis communique avec les gouvernements des possessions voisines. Par contre, aucun texte ne régit les attributions du Gouverneur de l’Océanie en cette matière. Enfin, l’administrateur des terres australes et antarctiques a les droits les plus étendus puisqu’il peut communiquer avec tous les représentants de la République dans la France d’outre-mer ou à l’étranger, ainsi qu’avec les autorités des Etats étrangers.

21. — Leurs attributions à régard des services publics

1. Les représentants du Gouvernement dirigent les services publics de l’Etat fonctionnant à leur échelon respectif et assurent une coordination générale entre ces services publics et les autres.

2. Les hauts-commissaires et les chefs de territoires non groupés nomment ou affectent les fonctionnaires mis à leur disposition à toutes les fonctions civiles des services de l’Etat placés sous leur direction, à l’exception de certains hauts fonctionnaires 4. Ils notent tous les fonctionnaires de l’Etat et peuvent prononcer la suspension temporaire de leur fonction.

3. Toutefois, le représentant du Gouvernement ne dirige pas le service judiciaire, il ne nomme pas les magistrats ; mais sans pouvoir s’immiscer dans le jugement des affaires, il veille à la bonne administration de la justice et dispose du pouvoir d’instruction à l’égard du chef du Parquet. Il donne son avis sur les recours en grâce, peut faire surseoir au paiement des amendes dues par des insolvables. De plus, le chef de territoire accorde — à la place du Président de la République et en se conformant à la loi — les dispenses en matière de mariage (dispense d’âge, mariage au degré prohibé). Enfin les chefs de territoires exercent les pouvoirs de police judiciaire conférés aux préfets par l’article 10 du code d’instruction criminelle. Les limites apportées à ce pouvoir par la loi métropolitaine du 25 mars 1935 n’ont été étendues qu’en Nouvelle-Calédonie.

22. — La représentation générale de l’Etat et fexercice des prérogatives de puissance publique.

1. Les hauts-commissaires et tous les chefs de territoires représentent l’Etat en justice et dans tous les actes de la vie civile (voir notamment le décret du 4 avril 1957 sur l’A.O.F. et l’A.E.F.). Dans les groupes de territoires, ce principe est nouveau et difficilement compréhensible ; auparavant, l’Etat y était représenté par le seul Haut-Commissaire, aujourd’hui il faut se demander, à propos de chaque affaire, qui du Haut-Commissaire ou du Gouverneur doit représenter l’Etat 5. On règlera cette difficulté en disant que le Gouverneur représente l’Etat 5 chaque fois que l’acte ou le litige engage une administration dont la compétence ne dépasse pas le cadre d’un seul territoire.

2. Les prérogatives de puissance publique sont en général exercées par le chef de territoire et non pas le chef de groupe. Ainsi, c’est le premier à l’exclusion du second qui élève le conflit d’attribution (Trib. Conf. 22 mai 1920 Lemaire, Rec. Lebon, p. 310), c’est lui qui exerce le droit de réquisition (décret du 22 mai 1939). Par contre, le pouvoir de déclarer l’utilité publique des expropriations et de prendre les arrêtés de cessibilité est exercé en A.E.F. par le haut-commissaire (décret du 8 août 1917), en A.O.F. il est partagé selon la collectivité qui effectue les travaux. Enfin, les permis de recherche minière du type A sont accordés par le haut-commissaire (ou le chef du territoire non groupé, mais avec l’accord des Assemblées intéressées.

3. Le décret du 22 juillet 1957 a transféré aux hauts-commissaires et chefs de territoires des attributions — d’ailleurs secondaires 6 — exercées auparavant par le Ministre de la France d’outre-mer. Mais ce décret est assez mal venu. D’une part, il transfère ces attributions aux représentants du Gouvernement en leur qualité de dépositaires des pouvoirs de la République, alors que certaines intéressant les services publics territoriaux (réseaux aériens d’intérêt local, coordination des oeuvres d’entr’aide et d’assistance) auraient dû leur être transférées en leur qualité de chef de l’administration. D’autre part, il leur transfère des attributions que d’autres textes ont expressément réservées à d’autres organismes : ainsi la coordination des oeuvres d’entr’aide et d’assistance sociales a été en Nouvelle-Calédonie transférée au Gouverneur par le décret du 22 juillet 1957 et à l’Assemblée territoriale par un autre décret du même jour concernant cette Assemblée.

23. — Les pouvoirs extraordinaires

1. Le décret du 4 mai 1946 attribue au seul haut-commissaire de la République des pouvoirs exceptionnels. En premier lieu, toutes les autorités civiles et militaires relèvent des hauts-commissaires qui peuvent suspendre de leurs fonctions tout fonctionnaire ou officier. En second lieu, ils peuvent déléguer provisoirement, dans toutes les fonctions et commandements, quel que soit le mode de nomination à ces postes, tout fonctionnaire ou officier de leur choix, à charge d’en rendre compte et en ce qui concerne les militaires de respecter les règles générales de l’Année. Mais le haut-commissaire a perdu ce pouvoir à l’égard des fonctionnaires des services territoriaux, ainsi qu’à Madagascar à l’égard des fonctionnaires des services provinciaux. En troisième lieu, au point de vue économique, les hauts-commissaires peuvent prendre toutes les mesures d’urgence nécessaires pour assurer la vie des territoires et leur développement, à charge d’en rendre compte. Mais ces pouvoirs ne peuvent permettre au haut-commissaire de prendre des mesures relevant des Assemblées locales ou du Parlement (Rép. min., J.O. déb. Cons. Rép., 5 août 1950, p. 2650). Par contre, ils permettent de prendre des mesures qui, s’il n’y avait pas urgence, relèveraient exclusivement du Gouvernement (V. note Luchaire, Rec. Penant 1949, p. 201).

a) En matière sociale, il adopte les programmes du 2e degré et des écoles normales, établit les programmes des examens spéciaux aux territoires et coordonne les oeuvres d’entr’aide et d’assistance. b) D’autres attributions ont été transférées à tous les chefs de territoires. Il s’agit de la fixation des élections partielles aux Assemblées territoriales, de l’ordre de transfert en France des fonds provenant des successions vacantes, des missions à la charge du budget territorial, de l’autorisation des translations des restes mortels. de la remise des dettes, débets et responsabilités intéressant le budget territorial, de créations de Caisse de stabilisation des prix (sous réserve des attributions de l’Assemblée territoriale), de la réglementation des Caisses de crédit agricole (après consultation de l’Assemblée territoriale), de l’agrément des aérodromes privés, de l’établissement des servitudes en matière de transmission radio-électrique, de la répartition des redevances de l’Institut d’émission, de l’adaptation du programme du premier degré de l’enseignement technique et des centres d’apprentissage, de la coordination des oeuvres sociales du territoire, des autorisations d’exercer à titre privé pour les médecins, dentistes et pharmaciens formés à Dakar, Tananarive ou Pondichéry.

2. Les chefs de territoires non groupés ne disposent de ces pouvoirs que s’ils ont reçu rang et prérogative de haut-commissaire ; c’est le cas actuellement pour le Gouverneur de NouvelleCalédonie.

III. — Leurs auxiliaires

24. — Les secrétariats généraux et l’inspection des affaires administratives.

Les Conseils privés ayant disparu, les représentants du Gouvernement sont assistés par un cabinet, un secrétariat général et des inspecteurs des affaires administratives.

1. Le cabinet — plus ou moins étoffé — se retrouve à tous les échelons

2. Le secrétaire général — qui auprès du haut-commissaire de l’A.O.F., de l’A.E.F. et de Madagascar a rang de Gouverneur — assiste chaque haut-commissaire ou chef de territoire qui peut leur déléguer certaines attributions. Il le remplace en cas d’absence ou d’empêchement dans sa double fonction de représentant du Gouvernement et de chef de l’administration. Toutefois, l’administrateur supérieur des Comores, l’administrateur de Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que les chefs de provinces malgaches sont chacun assistés dans les mêmes conditions d’un adjoint désigné par le chef du territoire parmi les administrateurs (ou administrateurs adjoints) en fonction dans le territoire. L’administrateur supérieur des terres australes et antarctiques est suppléé en cas d’absence à Paris par un chef des services administratifs choisi par lui et dans le territoire par le fonctionnaire du grade le plus élevé. Le rôle du secrétaire général s’amenuise dans les territoires ; en effet, avant la loi-cadre, il était placé au-dessus de tous les services publics. Bien souvent, le chef de territoire « gouvernait » et le secrétaire général « administrait », mais aujourd’hui la direction et la coordination des services territoriaux incombe directement au Conseil de Gouvernement. Il serait cependant utile que le secrétaire général puisse exercer une liaison permanente entre le Conseil de Gouvernement et les services d’Etat.

3. L’inspection des affaires administratives se compose d’un inspecteur général nommé par décret et ayant rang de Gouverneur auprès des hauts-commissaires de l’A.O.F., de l’A.E.F. et de Madagascar et d’un (Mauritanie, Dahomey, Niger), deux (Haute-Volta, Guinée et chaque territoire de l’A.E.F.) ou trois (Sénégal, Soudan, Côte-d’Ivoire) inspecteurs nommés par le haut-commissaire parmi les administrateurs en chef de classe exceptionnelle. Ils ne peuvent diriger aucun service mais ont un pouvoir général d’inspection sur tous les territoires civils à l’exception de ceux de la justice. On remarquera que le service de l’inspection des affaires administratives ne figure pas dans la liste des services de l’Etat.

Section III. – Les services publics de l’Etat

I. — Enumération

25. — L’énumération des services

Les services publics de l’Etat sont limitativement énumérés (décret du 3 décembre 1956 modifié après décision du Parlement par celui du 4 avril 1957). Tous les autres services sont territoriaux ou interterritoriaux. Mais l’énumération assez longue fournie par les textes précités ne signifie pas que l’Etat a l’obligation d’installer tous ces services, il en a seulement la possibilité et, en fait, bon nombre de ces services ne fonctionnent pas dans plusieurs territoires. Sous cette réserve, les services de l’Etat ont été classés en six rubriques.

1. Ce sont d’abord les services assurant la représentation du pouvoir central, non seulement dans les groupes territoires et provinces, mais aussi dans les circonscriptions administratives. En effet,conformément à l’article 88 de la Constitution, la tutelle des collectivités locales incombe àux délégués du Gouvernement.

2. Ce sont ensuite les services des relations extérieures, c’est-à-dire les services des relations diplomatiques et consulaires, du contrôle des frontières, du commerce extérieur, du contrôle des changes, de l’immigration, des relations et des échanges culturels.

3. En troisième lieu, ce sont les services de sécurité générale qui comprennent les forces armées et leurs services, la gendarmeriemet les pelotons d’intervention, les services du chiffre, de la défense passive, de la mobilisation économique, des douanes, et les services de police administrative (à l’exception des services de police municipale et rurale).

4. En quatrième lieu, ce sont les services qui assurent le respect des libertés, c’est-à-dire les tribunaux judiciaires de droit français, la police judiciaire, les juridictions administratives et l’inspection du travail.

5. En cinquième lieu, ce sont les services assurant le contrôle des communications extérieures : aéronautique et météorologie d’intérêt général, sécurité aérienne, réseaux de radiocommunication et de câbles sous-marin, sécurité maritime (phares internationaux et bateaux baliseurs), inscription maritime (mais seulement dans son rôle à l’égard des navires, de leurs équipages et de l’établissement national des invalides), capitainerie de ports maritimes.

6. Enfin, ce sont les services économiques, sociaux et culturels d’intérêt commun: trésor, contrôle financier, contrôle des sociétés d’Etat et d’économie mixte, services du plan dépendant de la section générale du Fonds d’investissements et de développement économique et social (F.I.D.E.S.), service de répartition entre les territoires des denrées et produits contingentés,services géographiques de la carte géologique et du commissariat à l’énergie atomique. Enseignement supérieur et réseaux de radiodiffusion et de télévision.

26. — L’énumération des Offices et Etablissements.

Les Offices et Etablissements publics de l’Etat sont également limitativement énumérés. A première vue, on pourrait croire que cette deuxième énumération est superflue puisque l’Etablissement public n’est qu’un mode de gestion des services publics. Mais on s’aperçoit que certains de ces Etablissements gèrent des services qui entrent dans la compétence des territoires, ou hien présentent un intérêt pour l’Etat comme pour les territoires.

1. Une première catégorie d’Offices et d’Etablissements correspond à des services d’Etat, ce sont: les Instituts d’émission d’A.E.F. et d’A.O.F., la Caisse centrale de la France d’outre-mer, l’Office des Changes, l’Université de Dakar, les Instituts des Hautes Etudes de Dakar et de Tananarive.

2. Une deuxième catégorie intéresse plus spécialement les territoires, ce sont : l’Office de la Recherche scientifique et technique et les Instituts qui en dépendent et l’Institut de Recherche scientifique de Madagascar, l’Office national anti-acridien, l’Institut d’Etudes centr’africaines, l’Office central des Chemins de Fer de la France d’outre-mer, l’Office central des Postes et Télécommunications d’outre-mer, l’Office du Logement maritime en Afrique centrale. Ce sont alors des organismes apportant leur concours technique aux territoires. Certains d’entre eux devront passer avec les territoires des conventions pour exercer leurs missions.

3. D’autres présentent un intérêt aussi bien pour l’Etat que pour les territoires : il s’agit de la Caisse générale des Retraités de la France d’outremer, de l’Institut d’Etudes centr’africaines, de l’Office des Etudiants d’outre-mer et des Offices d’outre-mer des Anciens Combattants et Victimes de la Guerre.

4. Une mention spéciale doit être faite pour l’Office du Niger qui postule une sorte de délégation des territoires à un Etablissement d’Etat pour la mise en valeur de la vallée du Niger (décret du 18 juillet 1948 modifié par celui du 22 octobre 1954).

Il. — Organisation

27. — Le financement des Services et Etablissements de l’Etat

Chacun de ces Services ou Etablissements fonctionne suivant les règles qui lui sont propres et dans le détail duquel il n’est pas possible d’entrer. La difficulté la plus importante se trouve dans leur financement, car avant les réformes de 1957, la plupart de ces services étaient financés par les budgets locaux, soit totalement, soit au moins pour leurs dépenses de matériel (c’était notamment le cas de la justice) et utilisaient donc des installations immobilières appartenant aux territoires. Les décrets précités ont donc dû prendre un certain nombre de mesures :

1. Toutes les dépenses — tant en personnel qu’en matériel — de ces services sont désormais à la charge du budget de l’Etat (y compris les missions d’impection de l’administration ou des juridictions administratives), qui acquiert les immeubles qui leur étaient affectés.

2. Toutefois, les territoires participent selon des proportion, fixées annuellement par la loi de finances, aux dépenses de l’Etat qui leur incombaient antérieurement.

3. Les prestations fournies entre services de l’Etat et services territoriaux font l’objet d’un remboursement réciproque.

4. Enfin, les services des Douanes et du Trésor fonctionnent essentiellement au profit des territoires. Il est donc normal que ceux-ci participent à leurs frais de fonctionnement. Leur participation a été fixée forfaitairement à 5 % des recettes effectuées pour les territoires, sans pouvoir dépasser les 2/3 des frais budgétaires de fonctionnement.

III. — Le personel

28. — Les différentes catégories de personnel

Le fonctionnement des services publics d’Etat est assuré par des catégories assez différentes de personnel.

1. Il est d’abord assuré par des « cadres d’Etat » dont la compétence concerne essentiellement les territoires d’outre-mer. Ces cadres d’Etat peuvent être répartis en trois groupes :

a) Il existe en premier lieu des cadres d’administration générale; c’est d’abord celui des Gouverneurs et Gouverneurs généraux (décret du 26 avril 1951), dont les membres sont nommés par décret du Chef de l’Etat en Conseil des Ministres. C’est ensuite celui des Administrateurs de la France d’outre-mer (administrateur adjoint, administrateur, administrateur en chef). Ce cadre fournit le personnel supérieur du Ministère de la France d’outre-mer, du Haut-Commissariat et des Gouvernements territoriaux. De plus, des Administrateurs sont placés à la tête des circonscriptions administratives et ont alors un triple rôle : agents administratifs, ils exercent les pouvoirs que le chef du territoire leur délègue ; agents judiciaires, ils sont officiers de police judiciaire et peuvent même présider certaines juridictions, enfin organes d’impulsion économique et culturelle, ils recherchent et mettent en oeuvre avec le concours des élus les moyens du développement de leur circonscription. b) Il existe en second lieu des cadres d’Etat à compétence technique: personnels de l’Armée (y compris la genda rmerie), inspecteurs du travail et des lois sociales, personnels des trésoreries d’outre-mer, officiers des ports et rades, chiffreurs. c) En troisième lieu, l’une des modifications apportées au décret du 3 décembre 1950 par décision du Parlement (décret du 4 avril 1957) prévoit la création, par décret en Conseil d’Etat, d’un cadre spécial d’Etat chargé de missions d’assistance technique. En effet, la plupart des services techniques (travaux publics, mines, etc…) sont désormais territoriaux; un personnel de haute qualification redoute légitimement de voir son avenir limité à un territoire ; la création de ce cadre d’Etat lui assurera de larges débouchés.

2. Le fonctionnement de certains services publics est aussi assuré par des fonctionnaires et agents des cadres métropolitains : c’est le cas par exemple pour l’enseignement supérieur et en partie pour le contrôle financier, dans la mesure où celui-ci fait appel au personnel du Ministère des Finances.

3. Des cadres de compléments organisés par les hauts-commissaires et chefs de territoires non groupés et dont le statut doit être analogue à celui des cadres territoriaux de même niveau, sont utilisés pour la gendarmerie, la police et les douanes.

4. Enfin les services d’Etat peuvent utiliser du personnel non titulaire ou des fonctionnaires détachés des cadres territoriaux.

29. — « L’africanisation » des cadres

Une plus grande participation des autochtones à l’administration de leurs territoires est l’une des grandes revendications des élus africains. Elle a donné lieu à la politique dite d’ « africanisation des cadres », bien qu’elle intéresse aussi hien les territoires du Pacifique.

1. Dans ce but, les décrets du 9 décembre 1956 et du 4 avril 1957 ont décidé de réserver aux originaires des territoires d’outre-mer 7, ou aux fonctionnaires de tous cadres y résidant sans interruption depuis 10 ans 66 % des places disponibles dans les cadres d’Etat, à l’exception de ceux des chiffreurs et de ceux dont l’entrée est décidée par décret individuel pris en Conseil des Ministres (notamment cadre des Gouverneurs et Gouverneurs généraux). Des concours spéciaux assurent le respect de cette règle.

2. De plus, dans chaque territoire ou groupe de territoires un contingent spécial de places dans les cadres d’Etat est réservé aux fonctionnaires d’autres cadres, mais originaires de ce territoire ou groupe de territoires ou y résidant.

3. Toutes les limites d’âge des divers examens et concours permettant d’accéder aux cadres de fonctionnaires de l’Etat (outre-mer comme dans la Métropole) sont reculées de cinq ans en faveur des candidats originaires des territoires d’outre-mer ou y résidant depuis 10 ans sans interruption. Ces mesures de faveur appellent plusieurs observations. En premier lieu, ne sont-elles pas contraires au principe de l’égalité des citoyens devant les emplois publics ? On a pu dire que ces avantages compensaient l’inégalité dans les conditions de l’instruction. C’est là un prétexte plus qu’une justification, car si l’on s’engageait dans cette voie, il faudrait examiner à propos de chaque candidat à un emploi public, s’il n’a pas été gêné dans ses études par une raison indépendante de sa volonté (maladie, misère des parents, etc…). En réalité, il faut bien comprendre que le grand principe de l’égalité devant les emplois publics a été établi par la Révolution et pour un pays unitaire dans lequel les possibilités d’instruction devraient être les mêmes pour tous. Il ne convient pas à un Etat multiraciste dans lequel l’administration d’un territoire doit, pour des raisons d’ordre politique, être le plus possible assuré par des originaires de ce territoire. En second lieu, on peut craindre que ces mesures ne produisent une administration techniquement moins bonne; mais on peut répondre qu’elle sera politiquement meilleure, car elle sera mieux acceptée des administrés. D’ailleurs, les textes précités prévoient qu’en cas d’insuffisance des concours réservés aux candidats que l’on a voulu favoriser, les places ainsi rendues disponibles seront pourvues par le recrutement normal.

Chapitre II. — La gestion des affaires territoriales

30. — La variété de l’administration territoriale

Il n’est pas possible d’étudier la gestion des affaires territoriales de façon uniforme pour tous les territoires. En effet, l’administration de chaque territoire a sa particularité. Toutefois, les territoires peuvent être répartis en quatre catégories. La première comprend les territoires des Comores, de la Côte des Somalis, de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie. Ces territoires sont administrativement isolés et leurs institutions politiques sont relativement simples; ils constituent la catégorie des territoires unitaires. La seconde catégorie comprend les quatre territoires de l’A.E.F. et les huit territoires de l’A.O.F. Ils offrent la particularité d’être groupés — et répartis — en deux groupes de territoires. Par suite, les institutions du groupe se superposent à celles des territoires. La troisième catégorie ne se compose que d’un territoire : Madagascar. Celui-ci n’est pas unitaire, mais est au contraire divisé en six provinces : les institutions du territoire se superposent à celles des provinces dans des conditions différentes de celles observées en A.O.F. et en A.E.F., qui sont des groupes de territoires tandis que Madagascar est à lui seul un territoire. Enfin la quatrième catégorie se compose des territoires de Saint-Pierre-et-Miquelon et de celui des terres australes et antarctiques; leurs conditions géographiques et démographiques interdisent en effet de les doter de toutes les institutions établies dans les autres territoires. Ce sont des territoires à organisation spéciale. Si l’on excepte cette dernière catégorie, des principes communs peuvent être dégagés, ce sont ceux énoncés par la loi du 23 juin 1956 : chaque territoire possède une Assemblée territoriale élue par un seul collège au suffrage universel et dotée de pouvoirs délibérants élargis (ceci est également vrai pour Saint-Pierre-et-Miquelon), un Conseil de Gouvernement élu par elle pour diriger les services territoriaux. Le représentant du Gouvernement reste le « chef de l’administration », ce qui lui permet de veiller à ce que chacun des autres organes fonctionne dans le cadre de sa compétence et dans le respect des lois. Il est donc à l’origine du contrôle qui pèse sur la gestion des affaires territoriales.

Section Première. — Les territoires unitaires

31. — Les principes généraux.

Les décrets du 22 juillet 1957 relatifs aux quatre territoires de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie, de la Côte des Somalis et des Comores n’ont pas — pour éviter semble-t-il des discussions parlementaires — refondu la législation et la réglementation existantes. Cette procédure oblige à rechercher une conciliation parfois difficile entre anciens et nouveaux textes 8. Notamment la distinction des pouvoirs exercés par le chef de territoire en tant que chef de l’administration de ceux qu’il exerce en tant que dépositaire des pouvoirs de la République devient très délicate. Les institutions des quatre territoires ne sont pas absolument identiques. En effet, la Nouvelle-Calédonie possédait le régime politique le plus décentralisé de tous les territoires d’outre-mer. Cela s’expliquait par l’importance de son peuplement européen et les conditions dans lesquelles elle avait rallié la France libre en 1940. Tout naturellement, les rédacteurs des réformes de juillet 1957 ont eu tendance à faire profiter la Polynésie française du même régime. Celui des Comores et de la Côte des Somalis est plus en retrait. De plus, aux Comores, le chef du territoire qui est placé sous la haute autorité du Haut-Commissaire de la République à Madagascar lui adresse une copie de ses rapports politiques et le tient régulièrement au courant de tous les faits se rattachant à la situation générale du territoire. Enfin, dans la gestion des affaires territoriales, le chef du territoire exerce de plus en plus une « magistrature d’influence » analogue à celle exercée pour l’ensemble de l’Etat par le Président de la République. Mais son influence sera d’autant plus sensible que ce ne sera pas seulement celle d’un homme, mais celle de la République disposant de ses propres services et surtout de son aide économique et financière. Elle sera aussi fonction de la personnalité des élus locaux. Le système qui va être exposé est en effet suffisamment souple pour permettre au chef du territoire de donner à l’administration territoriale l’impulsion nécessaire dans le cas où les élus n’auraient ni l’autorité, ni la compétence suffisante pour la donner eux-mêmes.

1. — Le chef de territoire

32. — Les attributions du chef de territoire dans la gestion des affaires territoriales

Les Gouverneurs de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie et de la Côte des Somalis, ainsi que l’Administrateur supérieur des Comores agissent dans les affaires territoriales tantôt seuls, tantôt par arrêté pris en Conseil de Gouvernement, tantôt sur la proposition d’un ministre territorial.

1. Leurs attributions personnelles sont limitées

a) En premier lieu, ils assurent la représentation du territoire en justice et dans tous les actes de la vie civile. Toutefois, en cas de litige entre l’Etat et le territoire, ce dernier est représenté par un Ministre désigné par le Conseil de Gouvernement (sauf en Polynésie où il est représenté par le Président de l’Assemblée territoriale). D’ailleurs, le chef du territoire n’agit pas de sa propre autorité, sauf en cas d’urgence 9. b) En second lieu, il veille au bon fonctionnement des autres organes territoriaux et au respect de leur compétence. En effet, il établit l’ordre du jour du Conseil de Gouvernement et convoque l’Assemblée territoriale. Il s’oppose à leurs réunions illégales et il peut suspendre l’effet de leurs décisions illégales en en demandant l’annulation au Ministre de la France d’outre-mer. Il rend exécutoires les autres décisions de l’Assemblée, mais peut auparavant exiger une deuxième lecture.

2. Les chefs de territoires agissent plus souvent « en Conseil de Gouvernement ». Les textes ne précisent pas ce que signifie exactement cette formule, voulant sans doute laisser à chaque territoire le soin d’élaborer sa propre pratique. Toutefois, il est dans la logique du système que les décisions prises en Conseil de Gouver- nement soient l’oeuvre de ce Conseil sous l’impulsion de son Vice-Président. C’est en effet le Conseil, et plus particulièrement le Vice-Président qui auront à répondre devant l’Assemblée territoriale, car les mesures prises en Conseil de Gouvernement consisteront le plus souvent dans l’exécution des décisions de l’Assemblée territoriale. Le chef du territoire prendra alors la décision en constatant qu’elle est bien voulue par le Conseil et n’a rien de contraire aux droits et aux libertés.

3. Les chefs de territoires assurent la direction des services publics territoriaux sur la proposition des Ministres territoriaux. Sur l’avis et avec le contre-seing du Vice-Président du Conseil de Gouvernement, ils doivent même déléguer la gestion de ces services aux Ministres territoriaux, mais ils doivent conserver les pouvoirs de nomination des fonctionnaires territoriaux et de sanctions disciplinaires qu’ils exercent sur la proposition du Ministre territorial intéressé et pour les chefs de services en Conseil de Gouvernement.

II. — Les Assemblées territoriales

33. — La formation des Assemblées territoriales

L’Assemblée territoriale ne se forme pas comme un Parlement, car elle ne vérifie pas elle-même les pouvoirs de ses membres et ceux-ci n’ont pas d’immunité. Par ces r.onditions de formation, elle se rapproche d’une Assemblée administrative.

1. L’Assemblée territoriale se compose de délégués élus pour 5 ans, mais en nombre variable suivant les territoires (34 aux Comores, 25 en Côte des Somalis et 30 dans les deux autres territoires). Les élections se font par circonscription (sauf aux Comores où elles ont lieu pour l’ensemble du territoire) au scrutin de liste avec représentation proportionnelle, suivant la règle de la plus forte moyenne sans panachage ni vote préférentiel et sans liste incomplète (Nouvelle-Calédonie et Polynésie) ou au scrutin de liste majoritaire (sans panachage ni vote préférentiel, ni liste incomplète), à deux tours (Côte des Somalis) ou à un tour (Comores) 10. Le contentieux des élections est confié au Conseil du Contentieux administratif.

2. Des inéligibilités spéciales frappent les officiers, les fonctionnaires d’autorité, les magistrats, les chefs de services et les comptables en service dans le territoire; des incompatibilités spéciales frappent les trois premières catégories de personnalités en service dans d’autres territoires, ainsi que les fonctionnaires en service dans les bureaux du Gouvernement territorial. C’est l’Assemblée qui reçoit la démission de ses membres et prononce leur démission d’office en cas d’incompatibilité ou de deux absences sans excuse légitime.

3. Les membres de l’Assemblée ne disposent d’aucune immunité mais perçoivent, en plus de leurs frais de transport, une indemnité fixée par l’Assemblée par référence au traitement d’une catégorie de fonctionnaire. Le Président perçoit une indemnité mensuelle — également fixée par l’Assemblée — pour frais de représentation.

34. — Le fonctionnement des Assemblées territoriales

Les Assemblées sont soumises au régime des sessions et à certaines règles de quorum, mais elles établissent librement leur règlement intérieur et leur bureau; elles délibèrent publiquement et en présence de l’administration.

1. Les Assemblées territoriales tiennent chaque année deux sessions ordinaires, mais elles peuvent être convoquées en session extraordinaire, par décision du chef de territoire en Conseil de Gouvernement. Cette décision doit être prise si les deux tiers des membres en font la demande au Président.

2. Les Assemblées sont maîtresses de leur règlement intérieur; elles élisent au scrutin secret leur Président et les autres membres de leur bureau dans les conditions fixées par leur règlement.

3. Elles ne peuvent délibérer qu’en présence de la moitié plus un de leurs membres en exercice ; si ce quorum n’est pas atteint au jour de l’ouverture de la session, celle-ci est renvoyée au troisième jour suivant; si le quorum vient à manquer en cours de session, la délibération est renvoyée au lendemain; dans ces deux cas, aucune condition de quorum n’est alors imposée.

4. Les séances sont publiques et les procès-verbaux sont publiés. Le secrétaire général du territoire assiste à toutes les réunions et peut se faire assister d’un ou plusieurs commissaires. Il en est de même pour les Ministres territoriaux qui viennent soutenir les affaires de leur compétence. Le chef du territoire y a accès et peut y prendre la parole quand il le désire.

35. — Les attributions des Assemblées territoriales en matière législative et réglementaire.

1. L’Assemblée territoriale dut prendre des règlements territoriaux dans les matières d’intérêt territorial énumérées par les décrets du 22 juillet 1957 et qui ont déjà été citées aux nos. 8 à 10 11. Ces règlements territoriaux restent des actes administratifs car ils sont susceptibles de recours, notamment s’ils portent atteinte à la législation et à la réglementation d’ensemble (voir n° 9 in fine) ou aux conventions internationales ou s’ils portent sur des matières premières aux autorités centrales de la République. Ces règlements territoriaux sont assortis de sanctions. En principe, la sanction est celle prévue par l’article 471, 15°, du Code pénal. Mais de plus, le chef de territoire, sur proposition de l’Assemblée et en Conseil de Gouvernement établit une échelle de peines allant jusqu’à trois mois de prison et une amende de 30,0000 francs métropolitains; l’Assemblée peut ensuite décider que tel ou tel règlement sera sanctionné par l’une des peines figurant sur cette échelle.

2. Dans les matières faisant l’objet de lois et de décrets, l’Assemblée peut émettre des voeux pour leur abrogation, leur modification ou l’extension des textes métropolitains.

3. L’Assemblée est obligatoirement consultée sur certains projets d’arrêtés réglementaires que le chef du territoire doit prendre en Conseil du Gouvernement dans certains domaines (organisation des services publics territoriaux et statuts particuliers de leurs agents, application du code du travail). Il est assez curieux que dans ces matières l’Assemblée territoriale — qui est un organe quasi-législatif — ne puisse donner qu’un avis à l’organe d’exécution de ses décisions. En fait il sera difficile au Conseil de Gouvernement d’aller à l’encontre des avis de l’Assemblée surtout lorsqu’elles concernent (organisation des services publics par exemple) des mesures d’application de ses propres décisions.

36. — Les attributions des Assemblées territoriales en matière administrative

1. En principe, le patrimoine territorial est géré, non par l’Assemblée mais par le Conseil de Gouvernement. Toutefois certaines mesures importantes nécessitent une décision de l’Assemblée (actions en justice, transactions au-dessus de 4 millions C.F.P., 10 millions C.F.A. ou de Djibouti, acceptation ou refus des libéralités, aliénation et échanges des biens immobiliers, exploitation des ouvrages publics, création des services publics, classement du domaine public, et pour les territoires du Pacifique plan des travaux à la charge du territoire). Mais en cette matière, le chef du territoire en Conseil de Gouvernement a seul l’initiative (sauf en Nouvelle-Calédonie où il la partage avec les membres de l’Assemblée) ; les décisions de l’Assemblée seront ensuite exécutées par le Conseil de Gouvernement.

2. En matière minière, l’Assemblée délibère sur la délivrance des permis de recherche du type B, elle est consultée sur la délivrance des permis de recherche du type A, qui sont délivrés par le chef du territoire ; mais en cas d’opposition de l’Assemblée territoriale, la décision est prise par décret après avis de l’Assemblée de l’Union française ; elle délibère sur l’octroi des concessions agricoles et forestières.

3. Elles sont consultées sur des mesures d’application de décisions plus générales :

a) Il en est ainsi pour certaines matières d’administration générale : circonscriptions administratives, création des communes de plein exercice, chefferies (seulement en Côte des Somalis) 12. b) Il en est ainsi ensuite dans des matières d’administration économique : représentation des intérêts économiques, encouragement à la production, nomination des représentants des territoires dans les Instituts d’émissions. En cette matière, les attributions consultatives des Assemblées de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie s’étendent à des domaines plus techniques 13 : agrément des aérodromes privés, servitudes radio-électriques, indice des prix et échelle mobile, tarif des P.T.T. et entretien de leurs réseaux.

37. — Les attributions des Assemblées territoriales en matière financière

Les Assemblées votent le budget, les impôts et gèrent les finances du territoire.

1. Les décrets du 22 juillet 1957 ne réglementent pas la procédure budgétaire qui reste fixée par les textes antérieurs. Le budget est donc préparé par le chef du territoire qui le rend exécutoire après délibération de l’Assemblée. Les décrets prévoient cependant que s’il n’est pas voté au 1er janvier les crédits de l’exercice précédent sont reconduits chaque mois et par douzième par le chef du territoire. Ce dernier a seul l’initiative des dépenses de personnels ou de création d’emplois. Dans les autres domaines, les membres de l’Assemblée ne peuvent proposer des dépenses ou des suppressions de recette qu’avec des propositions correspondantes de recettes ou d’économie.

2. Tous les impôts, droits et taxes à percevoir par le territoire sont établis par l’Assemblée, y compris les frais de justice; il en est de même pour les maxima des centimes additionnels à percevoir par les collectivités ou établissements publics du territoire, à l’exception des communes. Ces impôts sont en principe annuels, mais ils se reconduisent d’année en année tant que l’Assemblée n’a pas pris de nouvelles délibérations.

3. Toutes les mesures intéressant les finances territoriales sont prises par les Assemblées. Il en est notamment ainsi pour les emprunts, offres de concours, prêts, cautionnements avals, subventions, conventions avec des concessionnaires, etc…).

38. — Les pouvoirs d’information et de contrôle des Assemblées territoriales L’Assemblée territoriale dispose d’un pouvoir d’information très étendu et exerce à l’égard du Conseil de Gouvernement un contrôle de nature parlementaire.

1. Elle peut demander au Ministre de la France d’outre-mer (par l’intermédiaire du chef du territoire), tout renseignement sur des questions relevant de sa propre compétence. Elle peut également charger un ou plusieurs de ses membres de recueillir sur place les renseignements qu’elle estime nécessaires à l’exercice de l’une de ses compétences, mais cette mission ne peut être ni générale, ni permanente (Conseil d’Etat, 10 février 1949, Côte-d’Ivoire).

2. Elle surveille les comptes administratifs et la situation des fonds du territoire, mais surtout elle peut demander tout renseignement sur l’application de ses délibérations ou l’exécution du budget et faire toutes observations utiles à cet égard. Elle peut demander à entendre un membre du Conseil de Gouvernement et lui poser des questions. Enfin, chaque année, le Vice-Président du Conseil de Gouvernement lui adresse un rapport général sur la marche des services publics territoriaux. Ces explications sollicitées ou spontanées entraînent un véritable contrôle par l’Assemblée territoriale de l’activité du Conseil de Gouvernement. C’est pourquoi celui-ci peut — et pratiquement doit — démissionner s’il estime ne plus avoir la confiance de l’Assemblée.

III. — Les commissions permanentes

39. — Le rôle de la commission permanente

1. Les commissions permanentes furent instituées en 1946 par imitation des commissions départementales. Leur physionomie ne s’est pas modifiée. Or, cette commission se justifiait par la faible fréquence des sessions des Assemblées territoriales qui ne permettait pas aux élus d’exercer une surveillance constante de l’administration La création d’un Conseil de Gouvernement qui, comme la commission permanente, est élu par l’Assemblée territoriale, fait disparaître cette justification en partie tout au moins, car dans les cas urgents une décision de la commission permanente remplace utilement celle de l’Assemblée. Elle se compose de 3 à 5 membres élus chaque année et en son sein par l’Assemblée territoriale. Les parlementaires ne peuvent en faire partie 14, pas plus que le maire de la ville chef-lieu. Elle se réunit une fois par mois. Elle élit librement son bureau et décide à la majorité absolue, son président ayant voix prépondérante.

2. Ses principales attributions consistent à régler les affaires qui lui ont été déléguées par l’Assemblée, mais celle-ci ne peut se dessaisir pratiquement de ses pouvoirs par des délégations trop larges (Avis Conseil d’Etat, 3 février 1948). De plus, elle est saisie de toute question soumise à l’Assemblée, sauf en cas d’urgence. Enfin, elle examine chaque mois l’état détaillé des délégations de crédit et des mandats de paiement du mois précédent.

3. Lorsqu’il y a désaccord entre le chef du territoire et la commission, l’affaire est renvoyée à l’Assemblée. En cas de conflit, celle-ci est aussitôt convoquée et peut révoquer la commission. Le désaccord ne se distingue du conflit que par sa moindre gravité ou sa moindre urgence.

IV. — Le Conseil de Gouvernement

A. — Organisation

40. — Rôle du vice-président et du chef du territoire

1. Le Conseil de Gouvernement a son origine dans le Conseil privé qui, composé de chefs de service et de notables, assistait le chef du territoire. Mais il a une physionomie hien différente puisqu’il est entièrement élu et qu’il assure l’administration des affaires territoriales par l’exécution des décisions de l’Assemblée. Enfin, s’il est présidé par le chef du territoire, il est en fait dirigé par celui de ses membres qui a la qualité de vice-p-résident.

2. Il est composé de 6 à 8 membres ayant le titre de ministre, élus par l’Assemblée territoriale pour la durée de ses fonctions (parmi ses membres ou d’autres personnalités éligibles dans le territoire et âgés de 25 ans au moins), au scrutin de liste à trois tours (au troisième tour la majorité relative suffit), sans panachage ni vote préférentiel 15, l’élu en tête de liste prenant le titre de vice-président 16. Celui-ci est le chef réel du Conseil, donc pratiquement il choisit les membres parce que ceux-ci sont ses colistiers. Il peut d’ailleurs demander au chef du territoire de démettre un ministre de ses fonctions. C’est lui encore qui propose au chef du territoire la répartition des tâches entre les ministres et qui préside le Conseil en cas d’absence du chef du territoire; c’est lui enfin qui — après vis du Conseil — soumet chaque année à l’Assemblée un rapport sur la marche des services publics territoriaux.

3. Le chef du territoire préside le Conseil mais n’en est pas membre, car les décrets précisent que le Conseil se compose de 6 à 8 membres; de plus, tous les membres du Conseil de Gouvernement « sont solidaires en ce qui concerne les mesures arrêtées par lui ». La solidarité postule la possibilité, pour celui qui n’approuve pas la décision d’un Conseil, de démissionner de celui-ci ; or, le chef du territoire n’a pas cette possibilité. Mais le chef du territoire, outre sa présidence, dispose d’importantes prérogatives. D’abord, c’est lui qui établit l’ordre du jour du Conseil et en fait assurer le secrétariat. Une décision prise sur un point non compris dans cet ordre du jour serait donc nulle. Le chef du territoire peut d’ailleurs paralyser le Conseil qui déborderait de l’ordre du jour en retirant le secrétariat ; les textes lui permettent, dans ce cas, de le disperser et de prononcer la nullité des actes ainsi irrégulièrement intervenus. Ensuite, un grand nombre des délibérations du Conseil se traduisent par des arrêtés du chef du territoire qui peut donc refuser de les signer en cas d’illégalité. Enfin, lorsque la délibération du Conseil de Gouvernement est exécutoire par elle-même, le chef du territoire peut en suspendre l’effet pendant 3 mois — à charge d’en demander l’annulation par décret — si elle est illégale ou porte atteinte à l’ordre public, à la sécurité, ou aux libertés publiques. Sous ces réserves, et pour la gestion des affaires locales, le chef du territoire a un rôle très comparable à celui du Président de la République pour la gestion des affaires de l’Etat. Il exerce donc essentiellement une « magistrature d’influence » ; cette influence doit être sensible, car il représente l’Etat dont il dirige les services et dont l’aide (économique, technique ou autre) est évidemment indispensable à l’administration territoriale.

B. — Attributions

41. — Le rôle des ministres

1. Chaque ministre a la responsabilité — devant le Conseil de Gouvernement — d’un secteur administratif. Pour éviter toute confusion entre les services publics de l’Etat et ceux du territoire, le cumul des postes de Ministre territorial et de Ministre de Gouvernement métropolitain ou d’un autre territoire est interdit. De même, pour éviter toute confusion entre l’exécutif et le délibératif, la qualité de Ministre est incompatible avec celle de Président de l’Assemblée territoriale et celle de Président ou membre de la commission permanente.

2. Le Ministre territorial dispose d’un secrétariat — ou cabinet — ainsi que d’un traitement et des indemnités. Il veille à l’exécution des décisions de l’Assemblée et du Conseil en dirigeant le service dont il a la charge. Toutefois, le pouvoir de nommer les fonctionnaires territoriaux et de leur infliger des sanctions appartient au chef du territoire, mais est exercé sur proposition du ministre et — pour les chefs de service — en Conseil de Gouvernement. Enfin, le ministre suit les affaires de son service et en soutient la discussion devant le Conseil de Gouvernement et l’Assemblée territoriale.

42. — Le rôle du Conseil de Gouvernement

Le Conseil de Gouvernement assume une triple tâche dont il rend compte à l’Assemblée territoriale.

1. En premier, le Conseil prépare les décisions des autres organes délibérants. n arrête tous les projets qui sont soumis à l’Assemblée territoriale ou à sa commission permanente. Ceux qui proviennent de l’initiative d’un membre de l’Assemblée lui sont obligatoirement communiqués pour avis et il peut en exiger le renvoi à la session suivante.

2. En second lieu, il administre le patrimoine du territoire et délibère sur les questions relatives aux travaux publics territoriaux. Mais dans celles de ces matières où le pouvoir de décision appartient à l’Assemblée, il se home à en appliquer les délibérations.

3. En troisième lieu, il délibère sur des projets d’arrêtés qui seront ensuite pris par le chef du territoire. Pour des raisons déjà précisées (voir ci-dessus, n° 32), ces projets seront pratiquement l’oeuvre du Conseil de Gouvernement. Cette compétence s’étend d’une façon très générale à tous les actes réglementaires concernant la gestion des affaires territoriales, même lorsqu’ils sont soumis à l’avis d’un autre organisme (17). Cette formule comprend notamment tous les arrêtés pris pour l’ exécution des décisions de l’Assemblée territoriale.

43. — La responsabilité du Conseil de Gouvernement et de ses membres.

1. Chaque ministre supporte la responsabilité individuelle du service qu’il dirige. Cette responsabilité est sanctionnée par le droit du vice-président de demander au chef du territoire de prononcer la démission d’office d’un ministre.

2. Chaque ministre est de plus solidairement responsable des décisions collectives du Conseil Par conséquent, s’il est en désaccord avec celui-ci, il peut en démissionner, sinon il doit se conduire comme s’il avait donné son accord.

3. Le Conseil de Gouvernement en son entier est responsable devant l’Assemblée territoriale. Certes, les textes disposent simplement que le Conseil « a la faculté » (et non l’obligation) « de démissionner s’il estime ne plus avoir la confiance de l’Assemblée territoriale ». Mais en fait, c’est hien un régime de gouvernement responsable qui est organisé. En effet, chaque ministre doit répondre aux questions posées et fournir les explications demandées par un membre de l’Assemblée à laquelle un rapport d’ensemble est chaque année présenté. La solidarité qui unit les membres du Conseil pour toute mesure arrêtée par celui-ci ne peut qualifier qu’une responsabilité devant l’Assemblée. Toutefois, si le Conseil n’utilisait pas cette faculté de démissionner malgré la censure de l’Assemblée territoriale, l’impossibilité d’une gestion normale des affaires territoriales amènerait certainement le Gouvernement à dissoudre, soit le Conseil de Gouvernement, soit l’Assemblée territoriale. L’arbitrage revient donc au Gouvernement de la République.

V. — Les services publics territoriaux

44. — Leur organisation et leur personnel

1. Tous les services publics autres que ceux de l’Etat sont territoriaux. L’Assemblée territoriale décide de leur création et de leur suppression et peut leur donner la personnalité morale en en faisant des Etablissements publics. Mais l’Assemblée est simplement consultée sur leur organisation générale, qui est fixée par arrêté du chef de territoire en Conseil de Gouvernement. Leur gestion est ensuite assurée par un ministre territorial.

2. Le statut général des agents des services territoriaux est fixé par l’Assemblée territoriale qui doit créer un Comité consultatif de la fonction publique. Mais l’Asse~lée est simplement consultée — ainsi que le Comité précité — sur les statuts particuliers de chaque cadre, car ces statuts sont fixés par le chef du territoire en Conseil de Gouvernement. Les nominations, avancements, sanctions disciplinaires sont prononcés par le chef du territoire, sur proposition du ministre territorial intéressé. Celui-ci note le fonctionnaire en dernier lieu.

3. Pour compléter les cadres territoriaux, il peut être fait appel à du personnel des cadres métropolitains ou d’Etat qui servent alors en position de détachement dans le territoire. Celui-ci prend à sa charge l’ensemble de leur rémunération. Toutefois, si l’Etat ne peut mettre à la disposition du territoire le personnel de grades correspondants aux fonctions à exercer, le supplément de dépenses qui en résulte est à la charge de l’Etat, enfin, le territoire ne peut mettre fin à un détachement qu’en respectant un préavis de six mois.

VI. — Le contrôle de l’administration territoriale

45. — Le contrôle sur les organes et sur les actes.

Conformément à l’article 88 de la Constitution, le Gouvernement de la République et ses représentants assurent le contrôle administratif de la gestion territoriale. Ce contrôle s’exerce tant sur les organes que sur les actes. Mais pour ceux-ci, il se réduit (sauf en matière douanière) à un contrôle de légalité.

1. Le Conseil de Gouvernement et l’Assemblée territoriale peuvent être dissous par décret en Conseil des Ministres ; la seconde peut être également suspendue selon la même procédure, le décret de dissolution du premier est pris après avis de la seconde et doit fixer la date de la réélection du Conseil dans le mois de la dissolution.

2. Le chef de territoire oblige à se séparer l’Assemblée territoriale ou le Conseil de Gouvernement qui tiendrait une réunion illégale et prononce la nullité des décisions intervenues au cours d’une telle réunion.

3. Lorsqu’une délibération du Conseil de Gouvernement est entachée d’illégalité ou porte atteinte à la défense nationale, à l’ordre public, à la sécurité ou aux libertés, le chef du territoire peut en suspendre l’effet pendant 3 mois en en demandant l’annulation. Celle-ci peut alors être prononcée dans ce délai par décret en Conseil d’Etat.

4. Les délibérations de l’Assemblée territoriale (ou de sa commission permanente) sont transmises dans les 30 jours qui suivent la clôture de la session au chef du territoire qui les rend exécutoires dans les 98 jours (18) qui suivent leur notification. Mais de celui-ci peut auparavant, et dans les 30 jours de leur transmission, en demander, pour illégalité l’annulation qui sera prononcée par décret en Conseil d’Etat. Enfin, un décret en Comeil d’Etat peut toujours, sans aucune condition de délai, annuler une délibération entachée d’incompétence. En cas d’inopportunité d’une délibération, le chef du territoire peut simplement, au lieu de la rendre exécutoire, en demander, dans les 30 jours de sa notification, une deuxième lecture.

5° Toutefois, en matière douanière, les délibérations sont soumises à l’approbation tacite du Gouvernement métropolitain.

Celle-ci est donnée par l’écoulement d’un délai de 3 mois à compter de la réception de la délibération par le Ministre de la France d’outre-mer. Le refus d’approbation ne peut être opposé que dans ce délai et par décret (en Conseil des Ministres) soumis à ratification du Parlement (art. 13 du décret du 14 octobre 1954).

6° Enfin, en matière budgétaire, si l’Assemblée n’a pas voté la totalité des dépenses obligatoires, le chef du territoire – sans la participation du Conseil de Gouvernement — inscrit d’office celles qui ont été omises et rétablit l’équilibre réel du budget par tous moyens sans pouvoir toutefois ajouter de recettes nouvelles.

Section II. — Les Territoires Groupés

1. — Le problème politique 46. — Coordination ou fédération ?

La structure administrative des groupes de territoires pose de difficiles problèmes politiques et administratifs. La loi-cadre et ses décrets d’application ne les ont pas complètement réglés.

1. Pendant longtemps le Sénégal — dont les ressortissants furent les premiers citoyens français, puis électeurs du premier collège — fut le territoire-pilote de l’A.O.F. Dakar était tout naturellement la capitale administrative de l’A.O.F. D’ailleurs, l’administration étant centralisée et n’étant donc pas le fait des administrés, il importait relativement peu à ceux-ci qu’elle s’effectuât de Dakar plutôt que du chef-lieu de chaque territoire. Mais le développement économique de la Côte-d’Ivoire d’une part, le particularisme territorial tout naturellement reflété par les élections aux Assemblées territoriales suscitèrent des réactions. Les indépendants d’outre-mer (qui aujourd’hui ont formé la convention africaine), dont le leader Senghor était député du Sénégal, voulait réaliser la décentralisation politique dans le cadre du groupe de territoires ; par contre, le rassemblement démocratique africain dont le leader Hauphouet-Boigny était député de la Côte-d’Ivoire, voulait la réaliser dans le cadre du territoire. Cette opposition fut l’une des principales raisons qui empêcha le Ministre Louis Jacquinot de réaliser les réformes qu’il avait préparées dès 1953. Aux élections du 2 janvier 1956, le R.D.A. l’emporte dans de nombreux territoires, mais non évidemment au Sénégal ; son chef, devenu Ministre d’Etat, fit prévaloir son point de vue et l’article premier de la loi-cadre décide que « les institutions du groupe de territoires doivent devenir de simples organismes de coordination », notamment aucun Conseil de Gouvernement n’était prévu à l’échelon du groupe de territoires.

2° Les décrets ont appliqué ce principe, mais en ont fait ressortir les lacunes et les inconvénients.

a) La coordination des affaires des territoires d’un même groupe fait de certains services qui, dans les territoires unitaires sont territoriaux, des services interterritoriaux. Or, ces derniers sont dirigés par le représentant du Gouvernement métropolitain en l’absence de tout Conseil de Gouvernement à l’échelon du groupe. C’est donc reprendre d’une main ce qui est donné de l’autre.

b) La répartition de services publics du Gouvernement général entre les différents territoires oblige, soit à multiplier les services par le nombre de territoires, soit à les remettre à des agents qui, s’occupant de plusieurs services à la fois, n’ont plus la compétence technique suffisante.

c) Les territoires groupés ont des possibilités fiscales inégales, les uns sont pauvres, les autres riches ; le groupe de territoires répartissait les recettes selon les besoins de chacun. La décentralisation dans le cadre territorial fait apparaître beaucoup plus nettement la contribution des territoires riches à l’équilibre financier des territoires pauvres.

3° On s’explique alors la persistance des difficultés politiques et administratives qui, d’ailleurs, se présentent différemment en A.O.F. et en A.E.F.

a) En A.O.F., le Grand Conseil (19) a réclamé à l’unanimité un « exécutif » à l’échelon du groupe, que dans le langage courant on appelle beaucoup plus souvent Fédération. Les territoires de l’A.O.F. n’ont pas allongé la liste des services interterritoriaux dont le décret du 4 avril 1957 a fixé le nombre minimum, mais le Grand Conseil de l’ A.O.F. a maintenu la plupart des services du Gouvernement général en les qualifiant d’organes d’administration générale, ou en les rattachant aux services publics communs prévus par les textes.

b) En A.E.F., par contre, dans un souci d’économie et d’efficacité, une conférence interterritoriale a demandé aux territoires de « déléguer » un groupe de nombreux services qui resteraient donc interterritoriaux. En attendant la décision des Assemblées territoriales, dont certaines sont réticentes (Tchad, Gabon), une deuxième conférence interterritoriale a organisé provisoirement ces services et créé un Comité de coordination des transports. Mais l’Assemblée du Gabon, qui réunit des délégués du R.D.A. et de la Convention africaine, s’est opposée à la création d’un « exécutif » à l’échelon du groupe, car il préfère dépendre directement de Paris plutôt que d’un Conseil de Gouvernement interterritorial installé à Brazzaville et composé en majorité de non-Gabonais.

4° Devant ces désirs contraires, la Métropole qui, pour avoir suivi l’avis du parti majoritaire africain, fut accusée d’avoir voulu diviser et balkaniser l’Afrique, se doit de respecter une certaine neutralité tout en évitant toute contrainte à l’égard d’un territoire. Elle ne doit donc pas s’opposer à la création à l’échelon du groupe d’un exécutif pour les services inter-territoriaux, du moment que ce nouvel organisme n’interviendra pas dans les services nationaux. Mais elle ne doit pas imposer cet « exécutif fédéral » aux territoires qui n’en veulent pas. Elle doit donc donner à chaque groupe l’étendue et les organes d’exécution que pourrait réclamer l’accord unanime des territoires. C’est là tout le problème de l’avenir politique de ces territoires. Il est infiniment probable que ces territoires deviendront des Etats unis par un lien original à la France métropolitaine. Mais ces liens uniront-ils la Métropole directement à des Etats de la Côte-d’Ivoire et du Sénégal, du Gabon et du Tchad, coordonnant leurs intérêts communs ou à des Etats fédéraux de l’A.O.F. et de l’A.E.F.? Pour la Métropole, seul le lien importe, il appartient aux populations de choisir elles-mêmes à quel mât africain il sera accroché.

II. — Les affaires d’intérêt commun 47. — La répartition des matières

Les attributions qui ne sont pas conservées par l’Etat étant énumérées, la répartition des matières entre le groupe et le territoire se fait également pour chacun d’eux par voie d’énumération. Les matières d’intérêt commun peuvent être réparties en deux catégories :

1° Dans une première catégorie, le groupe a une compétence qui exclue celle du territoire.

a) Il en est ainsi en matière de justice pour tout ce qui concerne la procédure civile et les frais de justice, les officiers ministériels et publics et, d’une façon plus générale, les professions libérales. b) Il en est ainsi en matière de santé publique pour tout ce qui concerne la lutte contre les grandes endémies, les épizooties et la lutte phytosanitaire. c) Il en est ainsi en matière économique pour tout ce qui concerne les transports (y compris la circulation et le roulage), les modalités d’application du régime des substances minérales et l’obligation d’assurance à la charge des personnes dont la responsabilité est susceptible d’être engagée en vertu du Code civil.

2° Dans une deuxième catégorie, la compétence est partagée entre le territoire et le groupe selon l’importance de l’objet traité ou l’étendue de la réglementation.

a) En matière de tourisme et de chasse, le groupe a compétence pour tout ce qui concerne les zones cynégétiques. b) En matière de navigation, il a compétence pour les fleuves, canaux et rivières intéressant plusieurs territoires. c) En matière sociale et d’épargne, le Grand Conseil est consulté sur les modalités d’application du code du travail, mais seulement lorsqu’elles intéressent l’ensemble du groupe ; de même il réglemente les Caisses d’épargne fonctionnant pour l’ensemble du groupe. d) En matière fiscale, le groupe établit les droits d’entrée et non les droits de sortie, sauf en matière minière et pétrolière où sa compétence est absolue.

3° Enfin, le groupe est maître des moyens d’action qui lui sont propres. n réglemente tout ce qui concerne son domaine et ses marchés, il organise ses services publics et réglemente sa fonction publique.

48. — La répartition des services

Les services de l’Etat étant l’exception et ceux du territoire le droit commun, la répartition des services entre le groupe et le territoire se fait par l’énumération de ceux du groupe; tous les services qui ne relèvent ni de l’Etat, ni du groupe, sont donc territoriaux. Les services du groupe, que l’on. appelle tantôt services communs, tantôt services interterritoriaux, se répartissent en quatre catégories, dont les trois premières correspondent aux trois catégories de matières précédemment déterminées.

1° Une première catégorie comprend des services agissant dans des domaines dépendant exclusivement du groupe ; ce sont les services chargés de la lutte contre les grandes endémies, les épizooties et la lutte phytosanitaire et les services de géologie et de prospection minière (20) . Toutefois, en ce qui concerne la délivrance des permis de recherche, le groupe n’intervient que si le permis intéresse plusieurs territoires. 2° Une deuxième catégorie de services intervient dans des matières partagées entre le groupe et le territoire, ou pour lequel une coordination est nécessaire. Ce sont les services de coordination des affaires économiques et d’équipement, une Académie dans son rôle de coordination des services territoriaux d’enseignement, de culture et de recherche. Mais par sa décision en date du 29 août 1957 le Grand Conseil de Dakar a élargi cette catégorie en « rattachant » d’autres services aux services précédents. Ainsi a-t-il procédé pour les routes, fédérale et divers établissements d’enseignement (Médersa, lycees techniques, ecoles normales). 3° Une troisième catégorie correspond aux moyens d’action efficaces propres du groupe. Il s’agit d’une direction générale des finances et des «organes d’administration générale utiles à la gestion propre de tous les autres services ». Le Grand Conseil de l’ A.O.F., dans sa décision du 29 août 1957, a interprété très largement ce texte en classant dans cette catégorie des services comme ceux de l’information et de la délégation de l’A.O.F. à Paris, ce qui se conçoit fortbien, mais aussi celui de la dératisation à Dakar, ce qui prête à sourire. Sans doute a-t-il craint que les territoires ne suppriment certains de ces services si le groupe ne les gardait pas. 4° Une quatrième catégorie comprend des services agissant dans des matières où chaque territoire conserve en principe le pouvoir de réglementation. Le décret du 4 avril 1957 n’impose qu’un seul service de ce genre, c’est le service de la conservation du sol. Mais cette catégorie peut s’étendre par suite de transferts de services du territoire au groupe de territoires.

49. — Les affaires transférées

1. En effet, les Assemblées territoriales peuvent remettre au groupe de territoires des services qui leur sont propres et qui deviennent alors des services interterritoriaux. Cette procédure a été proposée aux territoires de l’A.E.F. pour maintenir la plupart des services du Gouvernement général. Les termes des articles 13 et 23 du décret du 4 avril 1957 montrent que ces transferts doivent être acceptés par le Grand Conseil qui gère les services transférés grâce à des contributions versées par les budgets territoriaux selon des proportions établiès par convention approuvée par le Grand Conseil et chaque Assemblée territoriale. Il n’y a donc pas délégation de pouvoirs, mais accord contractuel. Il en résulte deux conséquences très importantes. En premier lieu, le groupe ne peut être chargé d’un service sans son accord. En second lieu, ce service ne peut lui être retiré sans également son accord. C’est pourquoi, pour ne pas s’engager définitivement, les territoires auraient intérêt à préciser la durée de pareil transfert. La gestion de ces services — ainsi que celui de la protection des sols — peut présenter cependant des difficultés puisque ces services agissent dans des matières réglementées par chaque Assemblée territoriale. Une délégation de matières peut éviter ces difficultés. 2° En effet, les Assemblées territoriales peuvent demander au Grand Conseil d’établir une réglementation commune (même en matière fiscale), dans les matières relevant de leur compétence. Mais cette fois, rien n’empêche, semble-t-il, une Assemblée territoriale de prendre une délibération contraire et de supprimer pour son territoire ce pouvoir du Grand Conseil. Cela revient à reconnaître à chaque Assemblée territoriale le pouvoir de « nullifier » sur l’étendue de son territoire la décision du Grand Conseil prise dans une matière transférée. 3° On remarquera que la majorité des territoires d’un groupe ne peut contraindre la minorité à transférer au groupe une matière ou un service. Les transferts se font territoire par territoire et varient pour chacun d’eux. Il se peut donc que la compétence du groupe soit plus étendue sur certains territoires que sur d’autres. Enfin, deux ou plusieurs territoires limitrophes peuvent créer des services communs organisés par délibérations concordantes de leurs Assemblées territoriales et non par le Grand Conseil. L’avenir politique du groupe dépend donc de la bonne volonté de chaque territoire.

III. – Les organes territoriaux

50. – Les particularités de l’administration territoriale

Les territoires groupés gèrent leurs affaires propres dans les mêmes conditions que les territoires unitaires.• Toutefois, certaines particularités doivent être signalées.

1° Le chef du territoire groupé représente ce dernier en justice, même contre l’Etat, car celui-ci sera le plus souvent représenté par le Haut-Commissaire (voir ci-dessus, n° 22), mais il ne peut agir qu’en Conseil de Gouvernement, puisque celui-ci est chargé de l’administration des intérêts du territoire (21). Il peut déléguer en tout ou partie aux ministres territoriaux son pouvoir de nomination et de sanctions à l’égard des fonctionnaires territoriaux autres que les chefs de service. 2° Les élections (22) aux Assemblées territoriales se font dans le cadre de circonscriptions dont aucune ne doit compter plus de 450 000 habitants au scrutin de liste majoritaire à un tour. Chaque liste peut choisir une couleur et un signe pour l’impression de ses bulletins. 3° Les attributions des Assemblées sont plus réduites 23, car certaines matières relèvent du Grand Conseil (voir ci-dessus, n ° 46). De plus, la procédure budgétaire est régie par le décret du 4 avril 1957 qui précise que le budget est arrêté en Conseil de Gouvernement et présenté par le ministre responsable à la deuxième session de l’Assemblée. S’il n’est pas voté en équilibre à la fin de l’année, le chef du territoire en Conseil de Gouvernement établit un budget provisoire dont les dépenses ne peuvent dépasser celles prévues par le budget précédent et convoque l’Assemblée pour une session extraoridnaire de 8 jours. S’il n’est pas voté à la fin de cette session, le chef du territoire établit le budget définitif dans les mêmes conditions que le budget provisoire. Les membres de l’Assemblée ont comme le chef du territoire en Conseil de Gouvernement l’initiative financière, sauf en ce qui concerne les rémunérations du personnel. Enfin, l’évaluation du rendement futur des recettes incombe au chef de territoire en Conseil de Gouvernement. 4° Le nombre des ministres membres du Conseil de Gouvernement varie entre 6 et 12. Le chef du territoire peut déléguer en tout ou en partie aux ministres son pouvoir de nommer les fonctionnaires territoriaux (autres que les chefs de service) et de leur infliger des sanctions disciplinaires. 5° Le chef de territoire doit rendre la délibération de l’Assemblée territoriale exécutoire dans les 30 jours de sa réception, à moins qu’il n’ait dans ce délai demandé à l’Assemblée une deuxième lecture ou au Gouvernement l’annulation de la libération. Dans ce dernier cas, si 90 jours après la réception par le chef du territoire la délibération n’est pas annulée, le chef du territoire doit la rendre exécutoire dans les 8 jours. D’autre part, les délibérations économiques et financières sont communiquées aux autres Assemblées territoriales du groupe et ne peuvent être rendues exécutoires que 60 jours après cette transmission et que si dans ce délai, l’une de ces Assemblées n’a pas fait d’opposition. En cas de dissolution du Conseil de Gouvernement, les textes n’en imposent pas la réélection “dans le délai d’un mois.”

IV. — Les organes communs

51. — Le chef de groupe

Les pouvoirs du Haut-Commissaire en tant que chef de groupe sont plus réels que ceux du Gouverneur en tant que chef de territoire, car le premier les exerce seul, sans le concours d’un Conseil de Gouvernement provenant du suffrage.

1° En premier lieu, le chef du groupe assure la représentation du groupe en justice et dans tous les actes de la vie civile. Toutefois, en cas de litige entre l’Etat et le groupe, ce dernier est représenté par le Président du Grand Conseil ou par un membre de la Commission permanente spécialement désigné à cet effet par le Grand Conseil. En principe, il ne peut agir que sur décision du Grand Conseil qui gère les intérêts patrimoniaux du groupe (24).

2° Dans certains cas, l’urgence lui permet d’agir sans le Grand Conseil

C’est ainsi qu’il peut accepter, à titre conservatoire, les dons et les legs et faire tous actes conservatoires ou interruptifs de prescription,toujours en cas d’urgence il peut, sur avis conforme de la Commission permanente intenter toute action et y défendre. De même en cas de circonstances exceptionnelles, il peut suspendre ou réduire les cas fiscaux d’entrée et tous les droits miniers, mais sons réserve de ratification par le Grand Conseil.

3° Il est chargé de l’exécution des décisions du Grand Conseil.

Pour cela, il dispose du pouvoir réglementaire, il est l’ordonnateur du budget du groupe, il dirige tous les services interterritoriaux et nomme à tous les emplois de ces services dont il organise le fonctionnement et fixe le statut généra] des agents après avis du Grand Conseil ; il fixe enfin, après avis du Grand Conseil, l’échelle des peines sanctionnant les décisions de ce dernier. Il rend compte au Grand Conseil de cette exécutiop. en exposant chaque année la situation du groupe et en présentant son compte administratif.

4° Il veille au hon fonctionnement des organes du groupe et au respect de leur compétence.

A cet effet, il exerce à l’égard du Grand Conseil les mêmes attributions que le chef du territoire à l’égard de l’Assemblée territoriale, il établit d’office au budget du groupe les dépenses obligatoires omises par le Grand Conseil.

5° Il veille à la bonne coordination des intérêts communs aux divers territoires; dans ce but, il convoque des conférences interterritoriales soit d’office, soit lorsqu’une Assemblée territoriale s’est opposée à la décision d’une autre Assemblée du même groupe.

52. — Le Grand Conseil et sa Commission permanente

Le Grand Conseil est une Assemblée de superposition chargée de gérer les intérêts communs du groupe.

1. Il se compose de cinq délégués de chaque territoire élus par l’Assemblée territoriale parmi ses membres et pour la durée de son mandat à la représentation proportionnelle, sans panachage ni votre préférentiel, et d’après le système de la plus forte moyenne. Le contentieux des élections est confié au Conseil du Contentieux administratif. La Commission permanente se compose d’un membre titulaire et d’un membre suppléant pris dans la représentation de chaque territoire; les parlementaires et les conseillers de l’Union française ne peuvent en faire partie. Sous cette réserve, elle est soumise aux mêmes règles que les Commissiqns permanentes des Assemblées territoriales, mais en ,fait son importance s’accroît du fait de l’absence de Conseil de Gouvernement à l’échelon du groupe de territoires.

2° Il fonctionne dans les mêmes conditions que les Assemblées territoriales et il est soumis au même contrôle. Toutefois, ses sessions ordinaires précèdent celles des Assemblées territoriales qui peuvent ainsi ajuster leurs décisions financières en fonction de celles prises par le Grand Conseil.

3. Le Grand Conseil prend, dans les matières d’intérêt commun des règlements dans les mêmes conditions que les Assemblées territoriales dans les matières d’intérêt territorial. Il est consulté sur certains arrêtés réglementaires du chef de l’administration intervenant pour le groupe (organisation d’ensemble des services et statut général des agents, application du code du travail). Toutefois, ces arrêtés étant pris par le chef de groupe agissant seul, celui-ci plus de liberté d’action que le chef de territoire agissant en Conseil de Gouvernement. 4. Le Grand Conseil gère le patrimoine du groupe, mais le chef du groupe a seul en cette matière l’initiative et peut accomplir seul certains actes (voir ci-dessus, n° 49). En ce qui concerne les titres miniers, le Grand Conseil est consulté sur la délivrance des permis de recherche de type A et B, mais seulement quand ils intéressent plusieurs territoires. Les titres sont ensuite délivrés par le Haut-Commissaire, mais en cas de désaccord entre ces deux autorités, il est statué par décret pris en Conseil des Ministres après avis de l’Assemblée de l’Union française. En matière d’administration économique, il est consulté sur les projets de règlements du Haut-Commissaire concernant les organismes assurant la représentation des intérêts économiques. La procédure budgétaire obéit aux mêmes règles que dans les territoires du groupe. Le Grand Conseil prend les mesures financières intéressant le groupe (conventions fiscales, prêts, offres de concours, etc…) 5. Le Grand Conseil a, à l’échelon du groupe, les mêmes pouvoirs d’information et de contrôle que les Assemblées territoriales. 6. Enfin, il participe à la coordination des intérêts communs. Il peut en effet formuler une recommandation en vue d’assurer la coordination et éventuellement l’unification des réglementations territoriales, notamment en matière fiscale, mais dans les matières de la compétence des Assemblées territoriales il ne peut assurer cette coordination ou cette unification que sur la demande des Assemblées intéressées.

53. — Les conférences inter-territoriales

La conférence inter-territoriale est une institution nouvelle permettant la discussion de questions d’intérêt commun. Ce n’est pas cependant un organe permanent, elle est réunie par le chef de groupe et se compose des chefs de territoire (ou de leurs représentants) et des vice-présidents des Conseils de Gouvernement assistés des ministres territoriaux intéressés par l’ordre du jour de la réunion. Le chef du groupe est obligé de réunir la conférence dans deux cas : en premier lieu, lorsque la majorité des Conseils de Gouvernement du groupe lui en font la demande, en second lieu, lorsqu’une Assemblée territoriale estime qu’une délibération prise en matière économique ou financière par une autre Assemblée territoriale du groupe porte préjudice aux intérêts que la première représente. En principe, la conférence ne fait que formuler des recommandations sans valeur exécutoire. Toutefois, dans le deuxième cas de réunion obligatoire de la conférence, celle-ci peut recommander à une Assemblée territoriale de modifier la délibération incriminée. Cette recommandation en suspend l’effet et si l’Assemblée intéressée ne s’incline pas, la décision définitive est prise par décret en Conseil des Ministres après avis de l’Assemblée de l’Union française et du Conseil d’Etat. La conférence inter-territoriale ne paraît pas avoir la faveur du Grand Conseil de l’A.O.F., qui estime que c’est à lui que doit revenir l’arbitrage des difficultés opposant deux ou plusieurs territoires du groupe.

54. – Les services publics communs ou inter-territoriaux

1. Les services publics communs ou inter-territoriaux 25 sont créés et supprimés par le Grand Conseil, mais celui-ci ne peut créer que les services prévus par le décret 458 (art. 13) du 4 avril 1957 (voir ci-dessus, n° 48), ou qui lui ont été transférés par deux ou plusieurs territoires. Mais le Grand Conseil n’est que consulté sur leur organisation qui incombe au chef de groupe ainsi que leur gestion. 2. De même, il n’est consulté que sur le statut général des agents de ces services. L’établissement de ce statut général des statuts particuliers, les pouvoirs de nomination, d’avancement et de sanctions disciplinaires concernant ces agents, appartiennent au chef de groupe.

Section III. — Madagascar

I. — Le problème politique

55. — Unité ou provincialisation *

Le problème politique de Madagascar n’est pas sans analogie avec celui des groupes de territoires. En effet, une structure unitaire assurerait à Madagascar la prédominance de Tananarive et des Hovas, dont la formation administrative est plus accentuée que celle des populations côtières. Une provincialisation accentuée correspondrait mieux aux aspirations de ces populations côtières, mais ferait accuser la France de vouloir encore diviser pour régner.

Les conditions sont cependant différentes, car le caractère insulaire de Madagascar en fait une unité géographique, économique et même politique, bien plus réelle que celle que pourrait présenter un jour l’A.O.F. Les différences de dialectes et de coutumes y sont moins sensibles que dans la seule Côte-d’Ivoire. Enfin, le passé de l’ancienne dynastie royale de l’Imérina — qui cependant ne put jamais réaliser l’unité politique de l’île — donne à Madagascar une histoire qui facilite le développement du sentiment national. Il a donc fallu rechercher un équilibre qui, sans nier l’entité politique que constitue Madagascar, consacre l’existence des provinces et leur particularisme. C’est pourquoi Madagascar constitue, non pas un groupe, mais un seul territoire d’outre-mer doté de l’ensemble des institutions territoriales : chef du territoire,Assemblée représentative et sa Commission permanente, Conseil de Gouvernement. Mais d’autre part, Madagascar est divisée en six provinces dotées chacune d’institutions comparables à des institutions territoriales mais sans en avoir toutes les prérogatives : chef de province, Assemblée provinciale et Commission permanente, Conseil de province. La répartition des affaires entre le territoire et la province ne se fait pas dans les mêmes conditions que dans les groupes de territoires. A Madagascar en effet, les affaires de la collectivité composante sont plus nombreuses qu’en A.O.F. ou en A.E.F.Le problème de l’« exécutif » est réglé par la création d’un Conseil de Gouvernement à l’échelon du territoire et d’un Conseil de province à celui de la province. Enfin, l’autonomie de la province malgache (surtout en matière fiscale), est moindre que celle du territoire groupé et les difficultés entre provinces en matière économique et financière sont susceptibles d’être réglées par l’arbitrage de l’Assemblée représentative. Malgré ces réserves, il existe cependant des analogies entre les deux systèmes, ce sont donc seulement les particularités de l’organisation politique et administrative qui seront signalées.

II. — La répartition des affaires entre le territoire et les provinces

56. — La répartition des matières

Si le principe de répartition — par voie d’énumération limitative — est le même qu’en A.O.F., par contre son application est fort différente, car les matières de la compétence de la collectivité composante sont beaucoup plus nombreuses.

1. Le territoire a d’abord les mêmes compétences exclusives que le groupe. II faut de plus ajouter :

a) En matière de justice et de santé publique : l’enfance délinquante ou abandonnée, le régime pénitentiaire, la protection des aliénés, l’hygiène publique, sources thermales et protection de la santé. b) En matière économique, toute la navigation intérieure, la protection des sols, de la nature et des végétaux, le conditionnement à l’exportation, l’établissement d’un régime d’autorisation administrative pour l’exercice des diverses professions par les étrangers. c) Dans des matières diverses : le tourisme, la protection des monuments et des sites, la police des voies de communications. De plus, l’Assemblée représentative est seule consultée sur l’application du code du travail.

2° Les compétences partagées ne sont pas les mêmes que dans les groupes (à l’exception des Caisses d’épargne).

a) En premier lieu, le territoire possède un pouvoir de réglementation générale qui est exercé par l’Assemblée représentative générale en matière d’élevage et d’agriculture, de forêts, et par le chef de territoire en Conseil de Gouvernement en matière économique, de prix,de soutien à la p[oduction et de développement de l’éducation de base. Les organes correspondants des provinces ne peuvent réglementer que dana le cadre général ainsi tracé par le territoire. b) En matière fiscale, l’Assemblée représentative réglemente tous les impôts irzdirects et redevances de toute nature perçus par le territoire et les provinces, ainsi que le maximum, les centimes additionnels à ces impôts que pouvaient percevoir les collectivités et établissements publics. Elle fixe le mode d’assiette et les règles de perception des contributions directes basées sur le revenu ou le chiffre d’affaires. Bien que ces recettes profitent intégralement à la province, celle-ci n’en peut fixer que les tarifs. c) Bien que le droit coutumier local soit du ressort de la province, l’Assemblée représentative est chargée de son harmonisation et de son unification progressive, non seulement entre les divers usages locaux, mais aussi avec le droit civil français. d) L’organisation et le fonctionnement des communes mixtes sont de la compétence du territoire, leur création est de celle de la province.

3° Toutes les autres matières qui, dans les autres territoires sont de la compétence territoriale, sont à Madagascar de la compétence provinciale.

4° Le territoire et la province sont chacun maîtres de leurs moyens d’action, mais de plus, c’est l’Assemblée représentative qui délibère sur le plan d’équipement. Les Assemblées provinciales sont simplement consultées pour la partie du plan les concernant.

57. — La répartition des services

Les services du territoire de Madagascar sont limitativement énumérés et sont à peu près les mêmes que ceux d’un groupe ; il faut cependant ajouter les services du personnel et de l’élevage. De plus, le service chargé du plan n’est pas seulement un service de coordination 26. De plus, le service de la protection des sols applique cette fois une réglementation émanant de l’Assemblée dont il dépend. Enfin, la province n’intervient pas dans la délivrance des titres miniers. Le permis B est accordé par le Conseil de Gouvernement et le permis A par le Haut-Commissaire sur avis de l’Assemblée représentative. Les services de la province n’ont pas été énumérés, puisque ce sont tous ceux qui ne sont expressément réservés ni à l’Etat, ni à la collectivité territoriale de Madagascar.

58. — Les affaires transférées

Les provinces peuvent être transférées au territoire des services et des matières, dans les mêmes cqnditions que celles précisées pour lee transferts des attributions d’un territoire groupé au groupe dont il dépend. Mais, de plus, l’Assemblée représentative peut charger les Assemblées provinciales de fixer les modalités d’application dans la province des règlements territoriaux.

III. — Les organes provinciaux

59. — Les particularités de l’administration provinciale

Sous la très importante réserve de la plus grande limitation de des affaires propres, l’administration d’une province malgache est analogue à celle d’un territoire groupé. Ce sont seulement les différences séparant ces deux systèmes administratifs qui vont donc être signalés.

1. Le chef de province a, par rapport aux organes provenant du suffrage, une autorité plus grande que celle du chef de territoire, notamment c’est lui et non le vice-président qui prépare le rapport d’ensemble qui sera soumis à l’Assemblée provinciale par le viceprésident. C’est lui seul — sans le concours du Conseil de province — qui convoque l’Assemblée provinciale, établit le budget en cas de défaillance de l’Assemblée et inscrit d’office les dépenses obligatoires qu’elle aurait pu omettre. Enfin, c’est devant lui en Conseil de province que les conseillers provinciaux sont responsables et présentent leurs projets. Il a par rapport au Haut-Commissaire moins de liberté d’action que le chef du territoire groupé : en effet, quand le chef de province estime que la délibération de l’Assemblée territoriale ou du Conseil de province doit être annulée, il ne peut qu’en saisir le Haut-Commissaire et c’est ce dernier qui décide d’en demander l’annulation au Gouvernement métropolitain. Enfin, en cas de litige entre la province et soit l’Etat, soit Madagascar, la province sera représentée en justice par le Président de l’Assemblée provinciale.

2. L’Assemblée provinciale se compose de 40 membres élus suivant les mêmes modalités que les Assemblées des territoires groupés, mais dans des circonscriptions dont aucune ne peut avoir plus de 5 sièges. Ses pouvoirs sont de même nature que ceux des Assemblées territoriales, mais se trouvent considérablement limités par les compétences reconnues à l’Assemblée représentative. De plus, elle ne délibère sur l’octroi des concessions agricoles et forestières que si les premières dépassent 500 et les secondes 1 000 hectares. Dans les matières de sa compétence, elle prend des règlements provinciaux de même nature que les règlements territoriaux.

3. Le Conseil de province ne se compose que de six membres dont aucun n’a le titre de minist;re et ne peuvent être (en plus des cas d’incompatibilité précisés pour les Conseils de Gouvernement) président de l’Assemblée représentative ou membre du Conseil de Gouvernement. Le Conseil élit lui-même son vice-président parmi ses membres. La liste des arrêtés pris en Conseil de province est la même que pour les territoires d’A.O.F.; il faut ajouter cependant le fonctionnement des collectivités traditionnelles, après avis de l’Assemblée provinciale et l’établissement du cadastre, et il faut retrancher les statuts particuliers des fonctionnaires, les modalités d’application du code du travail, la suspension des droits indirects ou de douane. De plus, il doit respecter la réglementation générale établie par le territoire dans les matières relevant de la compétence de celui-ci.

4. Le contrôle de la gestion des affaires provinciales s’effectue comme celui de la gestion des affaires territoriales, sous deux réserves :

En premier lieu, c’est le Haut-Commissaire qui peut demander l’annulation d’une délibération du Conseil ou de l’Assemblée lorsqu’il en est saisi par le chef de province. En second lieu, une Assemblée provinciale ne peut s’opposer à la décision économique ou financière d’une autre Assemblée provinciale ; elle peut cependant en saisir le chef du territoire. Celui-ci peut, soit sur cette saisie, soit d’office, saisir l’Assemblée représentative après avoir pris l’avis d’une conférence inter-provinciale. Dans ce cas, l’Assemblée représentative prend une décision qui s’impose aux Assemblées provinciales intéressées.

IV. — Les organes territoriaux

60. — Le «chef de territoire» et le Con3eil de Gouvernement. 1. Le Haut-Commissaire de la République à Madagascar exerce en tant que chef de territoire, les mêmes pouvoirs que le chef d’un territoire groupé 27. 2. L’Assemblée représentative se compose de 9 délégués élus par chaque Assemblée provinciale dans les mêmes conditions que les membres des Grands Conseils. Elle fonctionne dans les mêmes conditions que le Grand Conseil et est soumise au même contrôle. Sa Commission permanente a une composition parallèle à celle du Grand Conseil, mais les attributions de 1 ‘Assemblée sont plus étendues que celles des Grands Conseils, ainsi elle fixe elle-même le statut général des agents des cadres territoriaux 28. Ses pouvoirs sont en fait tous ceux des Grands Conseils et des Assemblées des territoires groupés, à l’exception cependant de ceux reconnus aux Assemblées provinciales. Notamment elle exerce, pour la coordination de l’unification des règlements provinciaux, les mêmes pouvoirs que le Grand Conseil, mais de plus elle a un véritable pouvoir d’arbitrage entre les provinces en matière économique et financière, puisque comme on l’a vu (voir numéro précédent in fine) elle peut, sur la demande du chef du territoire et après avis d’une conférence inter-provinciale imposer sa décision à une Assemblée provinciale dans un domaine relevant pourtant de la compétence de cette dernière.

3. Le Conseil de Gouvernement présente, par rapoort aux Conseils de Gouvernement des territoires groupés, les différences suivantes :

a) L’Assemblée représentative étant composée de délégués des Assemblées provinciales, il était difficile de faire élire le Conseil de Gouvernement au scrutin de liste, car les listes auraient été difficiles à constituer, c’est pourquoi il se compose de 8 membres élus au scrutin uninominal à un tour, à raison d’un membre au moins et de deux membres au plus par province et ayant le titre de ministre. La qualité de ministre est incompatible avec celle de membre d’un Conseil de province. Le Conseil élit en son sein le vice-président; la limite d’âge de 25 ans n’est pas expressément prévue. En cas de dissolution, le renouvellement doit avoir lieu dans le délai d’un mois. b) La liste des arrêtés pris en Conseil de Gouvernement est moins longue. Elle comprend, en matière économique, la réglementation générale en matière économique et de prix et les mesures générales d’application de la réglementation relative au soutien à la production; en matière sociale, le programme général de développement de l’éducation de hase; en matière administrative les règles générales et les modalités particulières d’application du décret du 4 avril 1957 sur les collectivités rurales. c) Comme en A.O.F., il accorde le permis de recherches minières du type B sur délibération de l’Assemblée représentative. Enfin, il « assure la coordination des activités économique, sociales, administratives et financières de l’ensemble du territoire », et il donne son avis sur les négociations internationales entreprises par le Haut-Commissaire dans le domaine commercial.

4. La conférence inter-provinciale se compose, sous la présidence du chef du territoire, des chels de province ou de leurs représentants, des membres compétents du Conseil de Gouvernement 29 et des vice-présidents des Conseils de provJnce intéressés ; elle ne peut être réunie qu’à l’initiative — jamais imposée — du chef du territoire. De plus, cette conférence ne peut formuler que des recommandations sur des questions d’intérêt commun.

Section V. — Les territoires à régime spécial

I. – Saint-Pierre-et-Miquelon

61. – Le Conseil général

Le régime administratif de Saint-Pierre-et-Miquelon présente deux particularités essentielles. Ce territoire a conservé son Conseil général mais est dépourvu de Conseil de Gouvernement.

1. Le Conseil général de Saint-Pierre-et-Miquelon se compose de 14 membres élus dans trois circonscriptions au scrutin de liste majoritaire à deux tours. 2° Aucune affaire ne peut être soumise au Conseil général sans un examen préalable du chef du territoire. 3° Les attributions du Conseil général en ce qui concerne les affaires locales se divisent en trois catégories : dans certaines matières il prend des réglements territoriaux ayant la même valeur que ceux des autres territoires (commerce, mutualité coopérative, transport, santé publique, urbanisme, pêche, chasse, tourisme, sport, assistance, urbanisme, loyer, etc.…); dans d’autres, il statue par voie de délibération (encouragement à la production, frais de justice, gestion des intérêts du territoire, impôts, etc … ); dans d’autres enfin il est simplement consulté (travail et sécurité sociale, agriculture, forêt, mines, état civil, crédit, procédure civile, auxiliaires de justice, régime pénitentiaire, organisation des cadres locaux, etc.).

4. Le contrôle qui pèse sur les délibérations du Conseil général s’exerce dans des délais différents car la délibération devient exécutoire de plein droit si le chef de territoire n’en a pas demandé l’annulation pour illégalité dans le mois qui suit la clôture de la session en en avertissant des Présidents de l’Assemblée et de la Commission permanente; le Gouvernement dispose alors de deux mois à compter de cet avertissement pour en prononcer l’annulation par décret en Conseil d’Etat. Toutefois, en matière fiscale (ainsi que pour les emprunts etgaranties pécuniaires) , un contrôle d’opportunité subsiste; le chef du territoire rend la délibération exécutoire si elle n’a pas été annulée par décret en Conseil d’Etat dans un délai de 90 jours à compter de l’arrivée de la délibération au Ministère de la France d’outre-mer. Le ministre peut rendre la délibération exécutoire dès qu’il la reçoit. Enfin, en matière douanière, la procédure établie pour les autres territoires s’applique

II. — Les terres australes et antarctiques

62. — L’administrateur supérieur et le Conseil consultatif

Les terres australes antarctiques sont administrées par l’administrateur supérieur, chef de territoire, assisté d’un Conseil consultatif (loi du 6 août 1955 et décrets du 13 janvier et du 18 septembre 1956).

1. Le chef du territoire organise et dirige les services territoriaux, il détermine les impôts applicables dans le territoire par des arrêtés soumis à l’approbation du Ministre de la France d’outre-mer. L’approbation est considérée comme acquise si l’annulation n’a pas été prononcée dans les 90 jours à compter de leur réception au Ministère. Il fixe également les droits de douane qui entrent en vigueur dans les mêmes conditions que dans les autres territoires. Il représente le territoire en justice; toutefois, en cas de litige entre l’Etat et le territoire, celui-ci est représenté par le Président du Conseil consultatif ou toute , autre personne spécialement désignée à cet effet.

2. Le Conseil consultatif est composé de représentants des ministres intéressés (Défense nationale, France d’outre-mer, Education nationale, Aéronautique civile) et de deux personnalités scientifiques, tous nommés pour 5 ans. Il élit parmi ses membres son président et son secrétaire ; l’administrateur supérieur participe à ses travaux. Il est consulté sur le budget, les programmes de campagne et de missions, les demandes de concession et d’exploitation.

Chapitre III. — La décentralisation adminisrative

63. La diversité administrative

La décentralisation administrative se réalise à l’intérieur des territoires. Pendant longtemps, elle se réalisait par les chefferies traditionnelles. Ainsi coexistaient une administration centralisée, établie dans le cadre des circonscriptions administratives, cercles ou districts et une administration traditionnelle représentée par les chefs et les conseils autochtones. Le mouvement démocratique a conduit au contraire la décentralisation vers des formes se rapprochant de plus en plus des structures m9dernes d’administration locale élective. Cette rencontre des élites traditionnelles et électives n’a pas toujours été sans heurts et constitue l’un des problèmes les plus graves de l’Afrique Noire. Ce problème n’est pas encore complètement résolu : bien des divisions administratives ne comportent aucune institution décentralisée. Si les institutions communales électives se sont développées dans les centres urbains, les collectivités rurales n’en sont qu’à leur point de départ – sauf peut-être à Madagascar. Enfin, les chefferies traditionnelles subsistent et leur place dans la nouvelle organisation est souvent délicate à déterminer. Elle est d’ailleurs différente selon les territoires dans lesquels la décentralisation administrative est donc très diverse.

1. — Les divisions régionales

64. — Les divisions régionales en A.E.F. et A.O.F.

En A.E.F. (décret du 16 octobre 1946), les territoires sont divisés en régions dont les limites et les chefs-lieux sont fixés par arrêté du Gouverneur général. Ces régions sont divisées en districts dont les limites et les chefs-lieux sont fixés par arrêté du Gouverneur soumis à l’approbation du Gouverneur général. Des Conseils de notables indigènes peuvent être institués par arrêté du Gouverneur général. Le Conseil est présidé par le chef du district et comprend huit à seize autochtones nommés pour 3 ans sur proposition du chef de district par le chef de région, le Gouverneur ou le Gouverneur général TI se réunit au moins une fois par an en séance publique et est consulté sur l’impôt du minimum fiscal, les prestations, les patentes et l’exécution des travaux de tous genres intéressant le district. n ne peut délibérer que sur les questions qui lui sont soumises par son président. Le mandat est gratuit, des indemnités spéciales de séance et de déplacement peuvent être allouées. En A.O.F., les territoires sont divisés en cercles et en subdivisions. Des Conseils de notables indigènes fonctionnent dans les mêmes conditions qu’en A.E.F. (décret du 21 mai 1919 modifié par le décret du 1er avril 1936).

65. — Les divisions régionales des provinces malgaches

Les districts

Chaque district est administré par un chef de district assisté par un Conseil de district qu’il préside et qui comprend {décret du 9 novembre 1944) deux membres par canton avec un minimum de six, qui ont le titre de délégués cantonaux et sont élus parmi les notables pour 4 ans. Mais l’élection est soumise à la ratification du chef de l’administration, qui peut s’opposer à l’élection et rayer un délégué cantonal qui, pour des raisons de moralité ou par indifférence à l’égard de son mandat, se serait montré indigne de l’exercer.

Le Conseil de district se réunit obligatoirement une fois par trimestre ou sur convocation du chef de district. Il est consulté sur toute question intéressant la vie du district, notamment il doit être consulté sur les plans de campagne, de production et de travaux, de la création d’écoles indigènes, de postes médicaux et d’accouchements, de stations vétérinaires, de stations agricoles, création de marchés et foires, taux maximum de la taxe vicinale. Il décide de la répartition des ressources qui sont affectées aux collectivités et de leur emploi, ainsi que le montant des redevances à faire payer par les usagers des ouvrages édifiés par les collectivités. Dans l’intérêt de ces collectivités, le Conseil, ou chacun de ses membres dans l’intervalle des sessions, peut adresser des suggestions au chef du district. Enfin, le Conseil de district rend compte chaque année de son activité à l’Assemblée générale des notables du district.

66. — Les circonscriptions autonomes à Madagascar

Quelques districts d’une même province peuvent être groupés en circonscription autonome lorsqu’ils présentent une certaine unité économique 30.

1. La circonscription autonome — qui a la personnalité morale — est créée par arrêté du Haut-Commissaire en Conseil de Gouvernement, après avis de l’Assemblée provinciale et de l’Assemblée représentative. Elle est administrée par un chef de circonscription nommé par le chef de province et par un Conseil de circonscription comprenant les conseillers provinciaux, le président des collectivités rurales et d’un délégué de chaque Conseil municipal de la circonscription.

2. Le Conseil vote le budget préparé par le chef de la circonscription, il délibère sur tous les actes concernant les intérêts patrimoniaux de la circonscription autonome, notamment sur le programme des travaux d’intérêt général à entreprendre sur les fonds du budget de la circonscription et est consulté sur tous les travaux d’intérêt général à effectuer dans la circonscription, quel que soit le budget qui en assume la charge.

3. Le chef de circonscription assure l’exécution des délibérations du Conseil, ordonnance le budget et en tient le compte administratif.

4. La tutelle est organisée par le Haut-Commissaire, par référence à la tutelle des communes.

67. — Les institutions régionales aux Comores et en Océanie

1. Le territoire des Comores (décret du 24 septembre 1946) est divisé en quatre subdivisions correspondant aux îles principales (Grande Comore, Anjouan, Mayotte et Mohéli), placées chacune sous l’autorité d’un fonctionnaire des cadres généraux ou locaux, chaque subdivision est divisée en cantons; des postes administratifs peuvent être institués. L’administrateur supérieur crée les cantons et les postes et détermine les pouvoirs du chef de subdivision, de poste et de canton.

2. Le territoire de la Polynésie est divisé en cinq circonscriptions administratives placées chacune sous l’autorité d’un fonctionnaire des cadres généraux et divisées en postes administratifs. Chaque poste administratif comprend un certain nombre de districts, à la tête desquels se trouve placé un Conseil élu, doté d’attributions administratives. Les Conseils de district se composent de cinq membres titulaires et de deux membres suppléants élus au suffrage universel pour 6 ans, au scrutin majoritaire à un tour. Ils se réunissent en session ordinaire dans les cinq premiers jours du mois. Les Conseils de district élisent un président et un adjoint au scrutin secret, à la majorité absolue aux deux premiers tours et à la majorité relative au troisième. Le président, et en son absence l’adjoint, sont des auxiliaires de l’administration. Ils sont officiers de police judiciaire et de l’état civil et exercent la police des cimetières, des promenades et de la petite voirie ; ils veillent à la publication et à l’exécution des arrêtés et règlements, participent au recensement de la population, proposent la nomination (et la révocation) des agents de police des districts et peuvent les suspendre provisoirement.

II. — Les institutions communales

68. — La diversité des régimes communaux

1. Le régime communal n’est généralisé qu’à Saint-Pierre-et Miquelon (décret des 12 mars 1872 et 13 novembre 1945), divisé en deux communes comparables aux communes métropolitaines. Au Sénégal, le décret du 10 août 1872 avait institué quatre communes «de plein exercice» (Dakar, Rufisque, Gorée et Saint-Louis), suivant un régime également comparable à celui de la Métropole, et qui fut modifié par le décret du 3 janvier 1946. En Nouvelle-Calédonie, le décret du 8 mars 1879 (modifié par celui du 26 juin 1884) institua la commune de Nouméa, dont le régime fut étendu en Océanie à la commune de Papeete, instituée par le décret du 20 mai 1890 (modifié par les décrets des 29 mars 1900, 10 février 1937 et 5 août 1939), puis avec ces modifications à la commune d’Uturoa (décret du 18 juin 1945). A Madagascar, le décret du 28 janvier 1896 avait autorisé l’autorité locale à ériger en communes les centres de Diégo-Suarez, Sainte-Marie et Nossi-Bé. Des arrêtés locaux du 13 février 1897 et du 15 octobre 1897 avaient également érigé en communes les villes de Tamatave et de Majunga ; le décret du 2 février 1899 autorisa le Gouverneur général à ériger en communes les principaux centres de population. Mais ces communes n’avaient que des commissions consultatives élues. Aussi le décret du 9 octobre 1913 (décrets des 6 mai 1924, 9, mars 1925, 7 octobre 1930, 3 décembre 1936, 10 février 7, 16 février 1939, 5 mai 1939, 28 juillet 1939, 16 septembre 1939 et 3 mars 1945) a-t-il autorisé le Gouverneur général à transformer des commissions municipales en municipalités élues qui sont désormais soumises à un régime spécial contenu dans le même décret. Des institutions municipales peuvent être établies en A.E.F. et A.O.F. Elles comprennent des communes mixtes en A.E.F. décret du 17 avril 1920) et en A.O.F. (décret du 4 décembre 1920, Titre I), des communes de moyen exercice en A.O.F. (décret du 26 novembre 1947) ou des communes indigènes en A.E.F. (décret du 29 juillet 1942) et en A.O.F. (décret du 4 décembre 1920, Titre II).

2. Enfin, la loi du 18 novembre 1955, en instituant une quarantaine de communes de plein exercice en A.O.F., A.E.F. et Madagascar., leur a étendu le régime applicable au Sénégal. Elle a aussi posé certains principes concernant les communes de moyen exercice. Les décrets du 22 juillet 1957 ont étendu aux autres territoires les dispositions de la loi du 5 avril 1884 sur le syndicat des communes, ainsi que celles sur la comptabilité et les ressources (art. 2, 31 à 33 et 36), les marchés et les établissements d’assistance (art. 56).

3. Cette variété de régimes communaux oblige à classer les communes en plusieurs catégories. Dans l’ordre croissant de centralisation, on distinguera ainsi :

1. Les communes de plein exercice de l’A.O.F., l’A.E.F. et Madagascar 2. Les communes de plein exercice des autres territoires 3. Les communes de moyen exercice dont le maire est nommé, mais le Conseil municipal élu. 4° Les communes mixtes dirigées par un administrateur nommé, assisté d’une commission municipale, dont la composition résulte d’arrêtés locaux. 5° Les commissions municipales et les communes autochtones dont l’organisation est essentiellement régie par des arrêtés locaux.

A. — Le régime municipal en A.O.F., A.E.F., et Madagascar

69. — Les communes de plein exercice

Après la loi du 18 novembre 1955, il existe dans ces territoires 41 communes de plein exercice. D’autres peuvent être instituées par décret après avis (à la majorité absolue de l’Assemblée territoriale), mais seulement dans les centres pouvant disposer des ressources nécessaires à l’équilibre de leur budget. Ces communes sont régies par la loi du 5 avril 1884, telle qu’elle s’appliquait aux communes de plein exercice du Sénégal, ainsi que par la loi du 18 novembre 1955. Or, le régime applicable au Sénégal contenait certaines adaptations; de plus, les textes qui ont modifié la loi de 1884 n’ont pas tous été étendus et ne peuvent désormais être étendus — qu’il s’agisse de lois ou de décrets — que par le Président de la République, après avis de l’Assemblée de l’Union française. Le régime communal de plein exercice présente donc certaines particularités :

1. Le Conseil municipal est élu au suffrage universel et au collège unique (art. 10 de la loi du 25 juin 1956), au scrutin de liste avec représentation proportionnelle selon la règle de la plus forte moyenne sans panachage, ni vote préférentiel et sans liste incomplète. Mais le collège unique est tempéré par le sectionnement, qui est obligatoire pour toute commune composée de plusieurs quartiers distincts ou dont la population agglomérée est supérieure à 5 000 habitants. Dans le premier cas (31), chaque section doit avoir au moins deux conseillers à élire, dans le second au moins quatre. Sous cette réserve, chaque section élit un nombre de conseillers proportionnel au chiffre de ses habitants ou administrés français. Le sectionnement est fait par le chef du territoire, après avis de l’Assemblée territoriale; si les conditions du sectionnement se réalisent après une première élection municipale, il faut de plus consulter le Conseil municipal. Les règles de fonctionnement du Conseil municipal ne sont pas exactement les mêmes que dans la Métropole, car le décret-loi du 5 novembre 1926 n’a pas été étendu (32). 2. En ce qui concerne les maires et les adjoints, il faut signaler les différences suivantes :

a. Le nombre des adjoints est le nombre minimum fixé par l’article 73 de la loi municipale, car la loi du 27 juillet 1923, qui autorise le Conseil municipal à créer des postes supplémentaires d’adjoints n’pas été étendue 33.

b) Par contre, la charge de la réparation du préjudice, tant matériel que moral, résultant d’un accident dont seraient victimes dans l’exercice de leurs fonctions les maires, les adjoints et les présidents de délégations spéciales, incombe à la commune (art. 47de la loi du 18 novembre 1945) ; les conseillers municipaux et les délégués spéciaux bénéficient de la même garantie lorsqu’ils sont chargés de l’exécution d’un mandat spécial.

c) Par extension de l’article 104 de la loi municipale, le chef du territoire exerce dans toutes les communes de son territoire les attributions dévolues au Préfet de police dans les communes suburbaines de la Seine (art. 36 de la loi du 18 novembre 1955). Le maire reste cependant investi des pouvoirs qui lui sont confiés par l’article 105 (34).

d) En cas d’émeute entraînant la responsabilité de la commune, le territoire est substitué à l’Etat dans la contribution prévue par l’article 108 de la loi municipale.

3. Les pouvoirs de tutelle sont confiés au chef de territoire, ainsi que les pouvoirs de police non réservés aux maires. Mais le chef du territoire peut déléguer ces pouvoirs au chef de circonscription et les reprendre sans formalité. Les attributions confiées par la loi municipale aux Conseils généraux et aux Commissions départementales sont dévolues aux Assemblées territoriales et à leurs Commissions permanentes. Celles attribuées au Ministre de l’Intérieur sont dévolues au Ministre de la France d’outre-mer. La tutelle elle-même présente certaines particularités :

a) Les décrets de dissolution et de révocation doivent être signés par le Président de la République et la délégation spéciale est nommée par le chef du territoire (art. 41 à 46 de la loi du 18 novembre 1955). b) La liste des délibérations soumises à approbation est plus longue que dans la Métropole; il faut ajouter, en effet, les délibérations portant sur les transactions, tous les changements d’affectation d’une propriété communale déjà affectée à un service public, la vaine pâture. Il n’y a pas d’approbation tacite. Au contraire, quand le chef du territoire n’a pas fait connaître son approbation dans le délai d’un mois, celle-ci est considérée comme refusée et le Conseil municipal peut se pourvoir devant le Ministre de la France d’outre-mer. Les autres délibérations deviennent exécutoires un mois (au lieu de 15 jours) après le dépôt qui en a été fait au gouvernement du territoire, mais le chef du territoire peut, par arrêté, abréger ce délai. c) De même le délai pour prononcer l’annulation d’une délibération annulable est de 30 (au lieu de 15) jours; quand le chef du territoire est saisi d’une requête en annulation, il a 30 (au lieu de 15) jours pour statuer.

70. — Les communes de moyen exercice

Les communes de moyen exercice dans les Gouvernements généraux sont régies par la loi du 18 novembre 1955. Elles sont instituées par arrêté du chef du territoire en Conseil de Gouvernement — ou à Madagascar du chef de province — après avis de l’Assemblée territoriale — ou à Madagascar de l’Assemblée provinciale ; elles jouissent de la personnalité civile. Toutefois, ne peuvent être constituées en communes de moyen exercice que les localités ayant un développement suffisant pour disposer de ressources propres nécessaires à l’équilibre de leur budget. La commune de moyen exercice est soumise au même régime que la commune de plein exercice, mais son maire est un administrateur nommé par le chef du territoire. De plus, devant -les commissions chargées d’établir la liste des électeurs, la preuve testimoniale est admise pour la justification de l’identité de l’électeur. Une commune de moyen exercice peut, après une période de deux années suivant sa constitution, être érigée en commune de plein exercice suivant la procédure prévue pour la création d’une commune de ce genre.

71. — Les communes mixtes

1. En A.O.F., la commune mixte est créée et organisée par arrêté du chef du territoire pris en Conseil de Gouvernement, après avis de l’Assemblée territoriale dans les localités justifiant d’un développement suffisant pour leur permettre de disposer des ressources nécessaires à l’équilibre de son budget. Elle jouit de la personnalité civile, est administrée par un administrateur-maire, assisté d’une Commission municipale pour laquelle le décret du 4 décembre 1920 avait prévu trois degrés suivant que cette Commission était élue au suffrage restreint ou élue au suffrage universel. L’élection au suffrage restreint ayant été supprimée, il ne reste plue que des communes mixtes du troisième degré et des communes du pre:qtier degré. Dans les communes du premier degré, la Commission municipale est composée de notables désignés par le chef du territoire dans une liste sur laquelle figurent tous les Français de plus de 25 ans appartenant à certaines catégories (fonctionnaires retraités, décorés, anciens militaires, commerçants patentés, propriétaires). Dans les communes du troisième degré, l’élection se fait suivant les règles établies pour les communes de plein exercice du Sénégal, avec les mêmes règles de sectionnement obligatoire. La Commission comprend des membres suppléants en nombre égal à moitié des titulaires. L’administrateur-maire et la Commission municipale ont respectivment les mêmes attributions que le maire et le Conseil municipal dans les communes de plem exercice. De plus, l’administrateur-maire peut être assisté dans la gestion des affaires municipales par un notable nommé par le chef du territoire dans le sein de la Commission municipale. Ce notable porte le titre d’adjoint et est plus spécialement chargé de l’état civil. Enfin, le budget est établi par l’administrateur-maire, délibéré par la Commission municipale et arrêté par le chef du territoire.

2. En A.E.F., les communes mixtes (décret du 17 avril 1920) sont soumises à des règles analogues qui sont fixées par des arrêtés du Gouverneur général (arrêtés gubernatoriaux du 28 décembre 1956, 19 octobre 1940, 1er décembre 1943, 12 juillet 1950, 14 mars et 7 novembre 1951, 4 janvier, 27 février et 19 juillet 1952), mais désormais elles ne peuvent être créées que par le chef du territoire en Conseil de Gouvernement, après avis de l’Assemblée territoriale. 3. A Madagascar, la commune mixte est un centre de population érigé en commune par application du 2 février 1899. La création de la commune était décidée par .un arrêté du Gouverneur général, avec l’approbation du Ministre de la France d’outre-mer. Aujourd’hui, elle ne peut être créée que par le chef de province en Conseil de province, après avis de l’Assemblée provinciale. Les fonctions de maire sont assurées par l’administrateur de chef-lieu assisté par une Commission consultative dont la composition et les attributions sont fixées par arrêté du Gouverneur général.

71. — Les communes indigènes

1. En A.O.F., la commune indigène est créée par arrêté du chef du territoire en Conseil de Gouvernement, après avis de l’Assemblée territoriale, lorsque la localité est assez importante pour justifier cette création (décret du 4 décembre 1920, art. 7). Elle ne jouit pas de la personnalité morale; elle est administrée par une Commission de notables présidée par l’un d’eux et dans les conditions fixées par un arrêté du Gouverneur général. 2. En A.E.F., la commune indigène est régie par le décret du 29 juillet 1942 (Journal Officiel de la France combattante du 29 août 1942, p. 47), elle était instituée par le Gouverneur général sur la proposition du chef du territoire, pour une agglomération autochtone « où le sentiment de l’unité et le sens de la vie citadine sont suffisamment accusés » ; mais aujourd’hui, elle ne peut être créée que par le chef de territoire en Conseil de Gouvernement, après avis de l’Assemblée territoriale. Elle constitue une unité administrative autonome placée sous le contrôle d’un administrateur ou d’un agent de l’administration générale. Elle peut être dotée de la personnalité civile et avoir un budget sur décision spéciale du Gouverneur général, rendu en Conseil ; dans ce cas, le Gouverneur général détermine le cadre les postes et les modalités du budget. Si elle n’a pas la personnalité civile, les crédits nécessaires sont mis à la disposition de l’administrateur qui consulte le corps municipal sur l’emploi à leur donner. Tous les autochtones africains, français et étrangers font partie de la commune et doivent se faire inscrire individuellement sur les tableaux de recensement; les enfants de moins de 18 ans sont inscrits par leur chef de famille. La commune est administrée par un corps municipal de six à 1 douze membres nommés pour 2 ans par le chef du territoire qui a le droit de révocation et qui choisit parmi ses membres un président. Le corps municipal choisit pour un an un de ses membres comme secrétaire. Ses membres perçoivent une indemnité. Le corps municipal est obligatoirement consulté sur le taux et l’assiette de l’impôt personnel, des prestations et des patentes, l’exécution des travaux d’urbanisme, la création des associations d’indigènes, sur les institutions professionnelles indigènes, les mesures à prendre pour développer l’artisanat ou la culture locale, l’opportunité des prêts et avances consentis par la société de prévoyance aux habitants de la commune, le budget et le programme de cette société dans le Conseil d’administration de laquelle le Président du corps municipal doit siéger. Le corps municipal assure ou fait assurer l’exécution des ordres de l’autorité publique, maintient le hon ordre et la tranquillité publique, veille au hon fonctionnement des marchés et en assure la surveillance. Il participe à l’établissement de rôle et à la perception des impôts, au recouvrement de la pppulation et à la préparation des listes pour le recrutement.

B. — Le régime municipal dans les territoires unitaires

73. — La commune de plein exercice de Nouméa

L’organisation municipale de Nouméa a sa hase dans le décret du 8 mars 1879, auquel s’ajoutent des décrets ayant étendu certaines dispositions de la loi du 5 avril 1884 et des textes modificatifs, ainsi que quelques articles de la loi du 18 novembre 1955. Le décret du 22 juillet 1957 annonce une refonte d’ensemble de la législation municipale. En attendant, par rapport au régime municipal de plein exercice de l’A.O.F. et de l’A.E.F., les différences suivantes doivent être signalées :

1. Le corps municipal se compose du maire, de deux adjoints et de douze conseillers municipaux (décret du 8 mars 1879, art. 2). Les élections au Conseil municipal peuvent se faire par section, dont chacun doit élire au moins deux conseillers; les autres se répartiront proportionnellement à l’importance de la population. Les élections se font au scrutin de liste majoritaire à deux tours. Le fonctionnement du Conseil municipal présente certaines particularités. Seul le chef du territoire peut décider une session extraordinaire. Le tiers des conseillers municipaux peut demander une session extraordinaire au chef du territoire et, en cas de refus qui doit être motivé), au Ministre de la France d’outre-mer. Le maire préside le Conseil municipal avec voix prépondérante en cas de partage des voix; il est obligatoirement statué au scrutin secret si trois conseillers le demandent. Les attributions du Conseil municipal sont très réduites. Elles sont, en effet, fixées limitativement par les articles 38 et suivants du décret du 8 mars 1879, et aucune disposition ne donne au Conseil municipal le pouvoir général de régler les « affaires de la commune ». Au contraire, toute délibération portant sur des objets autres que ceux énumérés par le décret est nulle de plein droit.

2. La municipalité ne se compose que d’un maire et de deux adjoints, élus successivement au scrutin majoritaire à deux tours. Le maire agit sous l’autorité (et non pas seulement sous la surveillance) du chef du territoire. Ses attributions sont limitativement fixées et surtout le maire n’a aucun pouvoir de police, car ceux-ci restent entièrement de la main du chef du territoire (art. 32, § 13 du décret du 8 mars 1879). Toutefois, un arrêté du chef du territoire peut déterminer dans quelles conditions la police doit obtempérer aux réquisitions du maire.

3. Le contrôle de tutelle est plus sévère et les pouvoirs de l’autorité locale sont accrus. En premier lieu, c’est le chef de territoire qui prononce la démission d’office en cas de manquement sans motif légitime d’un conseiller à trois convocations du Conseil. C’est lui qui constate la nullité pour incompétence d’une délibération du Conseil ; toutefois, le Conseil municipal peut faire appel au Gouvernement qui statue par décret portant règlement d’administration publique; c’est lui aussi qui, sans appel, déclare la nullité d’une délibération prise hors d’une réunion légale. Le chef du territoire peut suspendre le Conseil si celui-ci se met en communication avec un Conseil municipal d’un autre territoire français ou publie des publications ou adresses (art. 27 du décret du 8 mars 1879). Il peut aussi le suspendre pour un mois ou le dissoudre dans les conditions fixées par la loi municipale (art. 43) et nommer dans ce cas une délégation spéciale dont il nomme lui-même le président et, si besoin, le vice-président. Il peut encore suspendre le maire pour une durée de trois mois (sans prolongation possible de la part du ministre).

74. — Les Commissions municipales en Nouvelle-Calédonie

En Nouvelle-Calédonie, des Commissions municipales ont été prévues par un arrêté local du 7 avril 1888, refondu par celui du 17 juillet 1954, qui en a porté le nombre à 23. Aujourd’hui, elles ne peuvent être instituées que par des arrêtés pris en Conseil de Gouvernement sur l’avis de l’Assemblée territoriale. Ces Commissions sont entièrement élues pour 6 ans, le premier dimanche de mai, au scrutin de liste dans deux sections (une section des districts une section hors district) . La Commission délibère sur les intérêts patrimoniaux de sa circonscription, mais les délibérations ne sont exécutoires qu’avec l’approbation du Gouverneur. Le Président de la Commission municipale assure seul l’exécution des délibérations de la Commission. De plus, en Nouvelle-Calédonie, sept Commissions régionales ont été instituées dans des circonscriptions qui ne comprennent que des districts; les grands chefs sont membres de droit de la Commission, mais celle-ci, qui n’a pas de budget, a un rôle essentiellement consultatif. Elle est appelée à se transformer prochainement en Commission municipale.

75. — Les communes de plein exercice de Papeete et d’Uturoa

Le régime municipal de Papeete et d’Uturoa est analogue à celui de. Nouméa, car les textes applicables en Nouvelle-Calédonie ont été étendus à la Polynésie. Il faut signaler cependant deux différences qui tiennent à deux textes concernant spécialement la Polynésie. Le premier (décret du 10 février 1937) concerne la composition du Conseil municipal dont le nombre varie comme dans la Métropole (mais en nombre pair), selon l’importance de la population 35. Le second (décret du 5 août 1939) permet d’établir des taxes municipales sur certains objets, ainsi que des centimes additionnels.

76. — Les communes de plein exercice de Saint-Pierre et de Miquelon-Langlade

Le régime municipal à Saint-Pierre-et-Miquelon présente une décentralisation plus accentuée qu’à Nouméa, car si le texte de hase (décret du 13 mai 1872) est du même modèle que le texte fondamental intéressant Nouméa, sont venues s’ajouter des règles en usage dans la Métropole.

1° Le Conseil municipal se compose de 16 conseillers à Saint-Pierre et 12 à Miquelon. Ils sont élus comme à Nouméa (36). Il fonctionne par contre comme dans la Métropole, mais les règles tutelle sont les mêmes que celles exposées pour Nouméa.

2. La municipalité est régie par des règles identiques à celles exposées pour Nouméa. Toutefois, le maire exerce des pouvoirs de police municipale (art. 32, § 7 du décret du 13 mai 1872) en tout ce qui se rapporte à la santé et à la liberté du passage sur la voie à l’éclairage, au balayage, aux arrosements, à la solidité et à la salubrité des constructions privées, aux mesures propres à prévenir et à arrêter les accidents et fléaux calamiteux, tels que incendies, les épidémies, les épizooties, les débordements, aux secours à donner aux noyés, à l’inspection de la salubrité des denrées, boissons, comestibles et autres marchandises mises en vente publique et à la fidélité de leur débit.

77. — Le régime municipal en Côte des Somalis et aux Comores

1. En Côte des Somalis et aux Comores, des communes de plein exercice soumises au même régime qu’en Nouvelle-Calédonie, peuvent être instituées dans les mêmes conditions.

En Côte des Somalis, le décret du 15 avril 1938 a autorisé le chef du territoire à ériger Djibouti en commune mixte et l’a chargé d’en déterminer le régime administratif et financier.

III. — Les chefferies et les collectivités rurales

78. — Les chefferies et les collectivités traditionnelles

Il subsiste, dans de nombreux territoires, une administration traditionnelle exercée par des chefs indigènes dont l’autorité a été maintenue. L’organisation de cette administration traditionnelle est actuellement régie par les coutumes et des arrêtés locaux. A Madagascar, les villages sont réunis en quartiers ou groupements de village, un chef de quartier nommé par le chef de district et choisi sur une liste de trois noms présentés par les notables du quartier, est chargé de veiller à l’exécution des ordres de l’administration et de contrôler les chefs de village. Les quartiers sont groupés en cantons et les cantons en gouvernements ayant chacun respectivement à leur tête un chef de canton ou un gouverneur indigène nommé suivant des arrêtés du Gouverneur général. En Nouvelle-Calédonie, à la tête des «districts» qui, purement autochtones, sont au nombre de 52, se trouvent des grands chefs ; chaque district est divisé en tribus (actuellement 335) ayant chacune à leur tête un petit chef. Le premier est héréditaire mais doit être agréé par un Conseil d’anciens, le second est nommé par le premier sur l’avis d’un Conseil d’anciens. Tous doivent être agréés par l’administration. Ils sont contrôlés dans chaque circonscription par le syndic des Affaires autochtones; qui est en même temps le chef de poste de gendarmerie. Des chefferies et collectivités traditionnelles ne peuvent être désormais réorganisées que par des arrêtés pris en Conseil de Gouvernement (ou de province à Madagascar}, sauf aux Comores et sur avis (sauf en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie) de l’Assemblée territoriale (ou provinciale à Madagascar). En A.O.F., où il y a plus de 50 000 chefs indigènes la hiérarchie comprend à la base des chefs de villages (ou de quartiers dans les centres urbains), les chefs de canton ou de tribus, parfois des chefs de province, de groupes de cantons ou de groupes de tribus et même d’anciens rois ou empereurs portant des titres divers, comme le Damel des Ouolofs au Sénégal, le Mogho-Naba, empereur des Moesi en Haute-Volta, l’Ardo, le Rouga ou le Mani ? des Peuls, le Djermakoye au Niger. Un projet de statut qui les considérait comme des « citoyens chargés d’un ministère de service public », n’a jamais vu le jour. La jurisprudence les considère tantôt comme des personnes privées (Conseil du Contentieux administratif de l’A.O.F., 1er avril 1947, Rec. Penant 1948, 154, note Auby), tantôt comme des agents ou fonctionnaires indigènes (Grand Bassam, 26 janvier 1945, Rec. Penant, 1947, 24). Dans certains territoires, et notamment en Guinée, on envisage de remplacer les chefe de cantons par des chefs de postes administratifs appartenant à un cadre spécial et servant de préférence hors de leur lieu d’origine.

79. — Les collectivités rurales 36

Les collectivités rurales ont été instituées d’abord à Madagascar par un arrêté gubernatorial du 7 juin 1950, créant les collectivités rurales autochtones et les collectivités rurales autochtones modernisées (C.R.A.M.), à la suite d’une ancienne institution qui tombait en désuétude de vie collective le Fokon’olona (décret du 9 novembre 1944) et des collectivités-témoins (arrêté gubernatorial du 2 août 1948). Les collectivités rurales ont alors fait l’objet pour l’A.O.F., l’A.E.F., d’une part, et de Madagascar, d’autre part, de deux décrets en date du 4 avril 1957. Le régime applicable en A.O.F. et en A.E.F. a été étendu par les décrets du 22 juillet 1957 aux autres territoires 37.

1. La collectivité rurale a la personnalité morale et budgétaire, mais elle ne peut être comparée à un département, car elle se superpose pas à la commune, mais laisse au contraire les centres urbains en dehors de son territoire.

2. Elle est gérée par un Conseil de collectivité rurale (dont la composition est fixée par arrêté local) , qui administre son patri moine, vote son budget, décide les travaux à entreprendre, ainsi que les actions en justice pour lesquelles elle est représentée par son président. Sa composition peut varier selon les territoires, elle pourra donc comprendre des chefs traditionnels aussi hien que des élus. Toutefois, à Madagascar où le rôle des notables est moindre, elle ne peut comprender que des élus.

3. Le chef du territoire (et à Madagascar le chef de province) exerce la tutelle de la collectivité rurale : il peut établir d’office le budget qui n’a pas été voté en équilibre; il peut dissoudre le Conseil de la collectivité qui, pendant deux exercices successifs, n’a pas voté son budget en équilibre et peut même supprimer la collectivité rurale qui n’a pas pu équilibrer son budget pendant trois exercices successifs. Enfin, une surveillance administrative et financière permanente est assurée par le chef de circonscription ou (à Madagascar) de district.

4. La création de ces collectivités rurales pose un assez grave problème. La collectivité rurale doit-elle se substituer aux Conseils de notables établis dans le cadre des districts ou des circonscriptions, ou hien doit-elle correspondre à une sorte de commune rurale ? Cette deuxième conception paraît mieux correspondre et aux nécessités de la décentralisation administrative et aux voeux du législateur qui ajoute (art. 1er de la loi du 23 juin 1956, dispositions des décrets concernant les attributions des ConFieils de Gouvernement) les collectivités rurales aux Conseils de circonscriptions et assimile la tutelle des collectivités rurales à la tutelle communale. Maie les deux décrets sur les collectivités rurales permettent de donner à celles-ci le cadre d’une cirçopscription administrative d’un groupement, ou d’une fraction de circonscription. Inversement, le décret concernant les collectivités rurales à Madagaecar charge le chef de province de déterminer les rapports de la collectivité rurale avec Fokon’olona et les Coneeils de district.

Conclusion

80. — Appréciation critique des réformes

1. Les réformes réalisées en 1956 et 1957 sont considérables. A l’individu, elles confèrent la plénitude des droits politiques par le suffrage univereel, le collège unique et la garantie d’accès à tous les services publics, même d’Etat. Elles achèvent les progrès réalisés par l’octroi, en 1946, des grandes libertés et, en 1952, des droits sociaux.

Au territoire, elles confèrent une autonomie indéniable pour qu’il gère désormais ses propres affaires par une Assemblée et un Gouvernement pratiquement responsable devant elle. A ces deux point de vue, l’oeuvre ainsi réalisée est excellente et assure aux territoires le calme politique dont ils jouissent actuellement.

2. Mais en certains points, des lacunes ou des imperfections apparaissent.

a) La répartition des matières entre la République et les territoires n.’est pas heureuse. Elle a été réalisée le plus souvent par découpage horizontal, la République ne se réservant dans la plupart des domaines les décisions générales ou les plus importantes, et ne donnant au territoire qu’un pouvoir subordonné de réglementation. Il en est notamment ainsi en matière commerciale (avec le code de commerce), en matière sociale (avec le code du travail), en matière de santé (avec le code de déontologie), etc … Il est à craindre par conséquent, que les territoires ne se heurtent trop souvent aux frontières de leur autonomie. Il aurait été plus clair — et politiquement plus heureux — de procéder par découpage vertical en laissant totalement certaines matières aux territoires sous les seules réserves des conventions internationales et de la Constitution française. b) La répartition des attributions que le représentant du Gouvernement exerce en tant que tel et de celles qu’il exerce en tant qu’autorité territoriale, n’est pas non plus suffisamment claire et il est à craindre que les élus territoriaux n’interviennent dans l’exercice de l’ensemble des pouvoirs du représentant dù Gouvernement, sans respecter la distinction essentielle entre affaires territoriales et affaires d’Etat. c) L’organisation des groupes de territoire fait apparaître une lacune : l’absence d’un exécutif issu du suffrage. Du moment que le groupe gère des affaires qui ne sont pas des affaires de l’Etat, il eût été normal que les décisions du délibératif élu aient été appliquées par un exécutif issu lui aussi du suffrage et non par le représentant de l’Etat. Les affaires territoriales sont confiées à un organisme élu ; pourquoi ces mêmes affaires si les territoires les transfèrent au groupe, ne sont-elles pas gérées dans les mêmes conditions ? d) L’autonomie territoriale, c’est-à-dire le courant ségrégatif, ne s’est pas trouvée suffisamment compensée par l’affermissement du pouvoir central. L’instabilité du Gouvernement français rend en effet le chef du territoire bien faible devant les élus du territoire et la distinction des services dépendant exclusivement de l’Etat, de ceux qui dépendent du territoire, risque de n’avoir aucune portée pratique. On s’explique alors les projets de réforme qui intéressent surtout le Titre VIII de la Constitution.

81. — La révision du Titre VIII de la Constitution. Les difficultés qui viennent d’être exposées n’ont pas échappé observateurs politiques. Pour y remédier, un grand nombre de politiques, tant africains que métropolitains, s’accordent à une réforme du Titre VIII de la Constitution dans un ??? fédéral. Certes, le fédéralisme est nécessaire et nous l’avons réclamé ??? la promulgation de la Constitution de 1946, avant même que partis africains n’en fassent un article de leur programme. Seul en effet, le fédéralisme d’une part satisfait les désirs du territoire qui veulent devenir des Etats et, d’autre part, maintient des liens permanents et institutionnels entre la Métropole et ses anciennes colonies. Mais le fédéralisme ne suffit pas à régler tous les problèmes, et il importe de dissiper deux confusions.

1. On entend dire parfois que le fédéralisme permettra de régler le problème des exécutifs « fédéraux » de Dakar et de Brazzaville. C’est jouer sur les mots. L’absence d’exécutif élu à Dakar et à Brazzaville vient de ce que l’on a craint qu’un tel exécutif n’étouffe l’autonomie territoriale. La transformation de la République française unitaire en une République française fédérale ne présage absolument pas de l’échelon — territoire ou groupe de territoire — à partir duquel doivent se nouer les liens entre la Métropole et l’Afrique. Conformément aux désirs du parti africain qui a obtenu le 2 janvier le plus d’élus, la loi du 23 juin 1956 a choisi le territoire comme point de décentralisation politique. Il appartient aux Africains d’en changer s’ils le désirent ou, au contraire, de proposer un exécutif de coordination qui ne menace pas l’autonomie territoriale; c’est là un problème bien particulier que la révision du Titre VIII ne peut régler.

2. On entend dire encore que la réforme de 1956 et 1957 a bien organisé les institutions de base et qu’il faut maintenant réorganiser celles du sommet. C’est vrai, la décentralisation politique doit conduire à un allègement des dispositions du Titre VIII qui lui sont contraires. Mais cette simple modification du Titre VIII ne contentera ni les territoires, ni la Métropole. Les territoires désirent surtout un élargissement de leur autonomie par une redistribution des matières — et aussi des services — ; ils ne sont que très secondairement intéressés par une réforme des organes qui ont à gérer les affaires communes à l’ensemble de la République. La Métropole désire un affermissement — mais non une extension — des pouvoirs de la République. Elle désire que l’exercice de ces pouvoirs soit soustrait aux pressions locales Il faut assurer la stabilité du Gouvernement de la République et, par la cohésion et la force des services publics dont il garde la direction. Une réforme du Titre VIII n’y suffirait pas. C’est à une réforme du régime politique qu’il faut procéder. On remarquera que les désirs des Africains et des Métropolitains ne sont nullement contradictoires; Une autonomie plus large et plus claire des territoires est parfaitement compatible avec un affermissement des pouvoirs que se réserve la République. Pareille réforme a aussi parfaitement sa place dans le fédéralisme et même surtout dans le fédéralisme. Mais elle se heurte à un obstacle qui risque d’être dirimant Le fédéralisme n’est pas compatible avec le régime parlementaire. Aucun Etat ne possède les deux à la fois. En effet, il n’y a de vrai fédéralisme que si les forces centrifuges — c’est-à-dire l’autonomie — sont compensées par une force centripète, c’est-à-dire la stabilité gouvernementale. Toute autre construction, même baptisée fédérale, ne peut être qu’une étape précédant la dissociation. Certes, la loi-cadre ne peut être qu’une étape; mais vers quel but ? Le vrai fédéralisme ou la dissociation ? Le premier ne peut être réalisé et la seconde évitée que par une révision très profonde des rapports du Gouvernement et du Parlement. Ce dernier aura-t-il le courage de le comprendre ?

Octobre 1957

Notes
*N.D.L.R. Voir dans le même numéro de la Revue l’article de M. Gaudemet sur la provincialisation de Madagascar.
**N.D.L.R. Voir dans ce même numéro de la Revue l’article que leur consacre M. Montagnat.
1. Sont-ils liés par les lois et règlements postérieurs aux réformes ? Oui, s’il s’agit d’une loi, car celle-ci doit être considérée comme replaçant dans le domaine législatif la matière qu’elle traitait. Non s’il s’agit d’un décret, car un décret intervenant dans les matières réservées aux territoires serait illégal.
2. Pour les P.T.T., le décret du 3 décembre 1956, modifié par celui du 4 avril 1957 établit un partage très particulier : un office central est chargé des intérêts de l’Etat, dans les territoires les P.T.T. peuvent rester services territoriaux ou être confiés à des offices locaux dans lesquels les représentants du territoire sont majoritaires, mais qui fonctionnent sous la tutelle de l’Etat. Ceci s’explique par le fait que les télécommunications intéressent la sécurité et les relations de l’ensemble de la République en même temps que des activités purement territoriales. Un régime analogue est prévu pour les chemins de fer.
3. Toutefois la province malgache ne pouvant être assimilée à un territoire d’outre-mer, le décret de nomination d’un chef de province n’a pas besoin d’être signé par le Chef de l’Etat.
4. Chefs de territoires, chefs de provinces malgaches, secrétaires généraux des territoires ou du Haut-Commissariat, inspecteurs généraux du travail, directeurs du contrôle financier. De plus, les agents du contrôle financier de l’Etat, les professeurs et maîtres de conférence des Facultés, les comptables du Trésor et les personnels du cadre général des trésoriers d’outre-mer restent soumis aux règles statutaires qui leur sont propres.
5. La même difficulté se présente pour la représentation du groupe de territoires.
6. a. Les attributions transférées aux Hauts-Commissaires et chefs de territoires non groupés sont les suivantes :
– En matière d’administration générale, le Haut-Commissaire décide les missions à la charge du budget qu’il exécute et fixe les indemnités de déplacement des cadres. régis par décret dans la limite des maxima fixés par décret.
– En matière financière, il prononce les remises de dette, débet ou responsabilité à l’égard du budget qu’il exécute.
– En matière économique, il autorise les transports aériens d’intérêt local, organise et contrôle les lignes reliant les territoires d’un même groupe ou entre l’A.E.F. et l’A.O.F. et les services français temporaires du territoire ou du groupe de territoires avec un pays étranger, s’il n’y a pas en contrepartie des droits de trafic donnés à ce pays; il prend toute décision concernant les réseaux aériens d’intérêt local. Il détermine les conditions d’application des lois métropolitaines portant révision des rentes viagères, nomme les administrateurs représentant les territoires aux Conseils d’Administration des Banques ou Instituts d’émission, fixe les redevances dues aux territoires par ces établissements, réglemente les distributions et transports d’énergie électrique et des forces hydrauliques après avis de l’Assemblée de son échelon.
7. Cette formule invoquant la naissance favorise aussi bien les Blancs que les Noirs originaires de T.O.M. Par contre, elle assimile aux métropolitains tous les originaires des départements d’outre-mer Antillais et Réunionais.
8. Les attributions du chef de l’Administration doivent être en grande partie recherchées dans les anciens textes. Il en est de même pour la composition et le fonctionnement des Assemblées décrets du 25 octobre 1946 et loi du 6 février 1952, loi du 19 août 1950 pour la Côte des Somalis, du 17 avril 1952 pour les Comores, du 21 octobre 1952 pour la Polynésie et du 10 décembre 1952, pour la Nouvelle-Calédonie, avec cependant les modifications apportées par les décrets du 22 juillet 1957 pour ces quatre territoires et les lois du 26 juillet 1957 pour les deux territoires du Pacifique. Par contre, tout ce qui concerne le Conseil de Gouvernement est contenu dans le décret du 22 juillet 1957.
9. Il lui faut en effet l’autorisation de l’Assemblée territoriale; en cas d’urgence, il peut en Conseil de Gouvernement décider d’agir et de faire des actes conservatoires. Mais dans ce cas, les actes judiciaires ne peuvent être accomplis en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie que sur l’avis conforme de la Commission permanente.
10. La circonscription unique et le scrutin majoritaire à un tour permettent aux Comores de faire disparaître l’opposition.
11. Toutefois, ces matières ne sont pas exactement les mêmes dans tous les territoires. La liste la plus longue est celle de la Nouvelle-Calédonie avec 41 rubriques. Viennent ensuite : la Polynésie 38 rubriques., les Comores 35 rubriques. et la Côte des Somalis 34 rubriques.. Notamment, les Assemblées de ces deux premiers territoires peuvent réglementer le soutien à la production. Celle de Nouvelle-Calédonie réglemente la Sécurité sociale, coordonne les oeuvres d’entr’aide et d’assistance sociales sous réserve du décret modifié du 24 février 1957 sur les accidents du travail., mais doit laisser son Conseil de Gouvernement réglementer les loyers. De plus, les Assemblées de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie peuvent réglementer les conventions à passer avec l’Etat concernant les postes émetteurs de radiodiffusion et de télévision. Or, on ne voit pas comment une convention avec l’Etat peut être « réglementée » par le territoire.
12. Dans les autres territoires où se trouvent des chefferies Nouvelle-Calédonie. ou même un sultanat Comores., des difficultés peuvent surgir entre les chefs et les élus. Il était donc difficile d’en remettre le règlement aux seconds.
13. Par contre, les Assemblées des Comores et de la Côte des Somalis sont consultées sur la réglementation de l’immigration, ainsi que celle relative au soutien à la production. Cette dernière fait l’objet de règlements territoriaux dans les deux autres territoires.
14. En Côte des Somalis, l’inégibilité s’étend aux Conseillers de l’Union française.
15. En cas de vacance, une élection partielle a lieu dans les mêmes conditions.
16. A défaut de précision du texte en cas de vacance du poste de Vice-Président, les Ministres restent en fonction, le second de liste devient donc Vice-Président.
17. D’une façon plus précise, les textes énumèrent — sans que cette énumération ait un caractère limitatif — quelques domaines dans lesquels les arrêtés du chef du territoire sont pris en Conseil de Gouvernement.
En matière économique, il s’agit de : la réglementation économique du commerce intérieur, t’organisation des foires et marchés, les mesures d’application de la réglementation relative au soutien à la production, la création des organismes assurant dans le territoire la représentation des intérêts économiques. De plus, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie, les textes ajoutent l’application et le contrôle de la réglementation générale sur les poids et mesures et de la législation métropolitaine sur la répression des fraudes alimentaires, la délivrance des autorisations personnelles en matière minière, l’institution de zones de protection minière A, l’autorisation d’occupation de terrains utiles aux travaux de mines. Enfin, en Nouvelle-Calédonie, il faut ajouter les loyers qui ont été retirés à la compétence de l’Assemblée territoriale.
En matière sociale, il s’agit du développement de l’éducation de base et des modalités d’application du Code du Travail.
En matière administrative, il s’agit de la convocation de l’Asemblée territoriale en session extraordinaire, la création suppression et modification. des circonscriptions administratives du territoire et de la modification de leurs limites géographiques, la création, la constitution, l’organisation et le fonctionnement des communes autres que de plein exercice, des commissions municipales, des commission régionales et des collectivités rurales, la création du centre d’état civil, les statuts particuliers des cadres territoriaux de fonctionnaires. En Nouvelle-Calédonie, il faut ajouter l’organisation des chefferies car elle a été retirée à l’Assemblée territoriale. Enfin, lorsque les circonstances exceptionnelles l’exigent et sous réserve de ratification par l’Assemblée territoriale, les droits d’entrée on de sortie, les droits indirects frappant des articles peuvent être modifiés suivant la même procédure.
18. Les textes n’imposent aucun délai précis. Mais, quand le chef du tenitoire demande l’annulation, il doit promulguer entre le 9e et le 98e jour suivant la notification. Le délai s’impose donc à plus forte raison quand il n’y a pas demande d’annulation.
19. Le R.D.A. est maintenant le groupe le plus nombreux au sein du Grand Conseil, il redoute moins l’emprise du Sénégal sur l’administration du groupe. Dans son Congrès de Bamako septembre 1957., il a réclamé « la démocratisation des organes exécutifs fédératifs ».
20. Le permis de recherche du type A est en A.O.F. et en A.E.F. toujours délivré par le Haut-Commissaire, mais en tant que représentant du Gouvernement.
21. Il peut, en Conseil de Gouvernement ou même seul en cas d’urgence, accepter à titre conservatoire, les dons et les legs. Il peut, en cas d’urgence, faire seul tout acte conservatoire. Pour les actions en justice, voir no 47, note 2.
22. Les électeurs élisent 34 conseillers en Mauritanie, 40 au Gabon et dans chaque province malgache, 45 au Moyen-Congo, 50 en Oubangui-Chari, 60 au Sénégal, Côte-d’Ivoire, Guinée, Niger et Dahomey, 65 au Tchad et 70 en Haute-Volta et au Soudan.
23. Toutefois, aucune disposition du décret du 4 avril 1957 ne leur donne compétence en matière d’action en justice. Il semble que dans ces conditions, il appartient au Conseil de Gouvernement d’en délibérer en vertu de ses pouvoirs généraux de gestion art. 10.
24. Toutefois, il peut effectuer seul des transactions dans les litiges dont l’intérêt ne dépasse pas 5 millions C.F.A.
25. Les textes utilisent tantôt l’une, tantôt l’autre de ces expressions. De plus, ils permettent à deux ou plusieurs territoires limitrophes de créer des services communs à deux territoires. Mais ces derniers ne doivent pas être confondus avec ceux transférés au groupe, pas tous les territoires ou même certains territoires du groupe, car ils sont gérés directement par les territoires intéressés et non par le Grand Conseil.
26. Dans ces conditions, il est regrettable que les auteurs du texte concernant Madagascar aient cru reproduire la formule utilisée par les groupes du territoire et selon laquelle tous ces services n’ont qu’un but de coordination.
27. Toutefois, en cas de litige entre l’Etat et le territoire, ce dernier est représenté par le Président d l’Assemblée représentative.
28. Le Grand Conseil n’est que consulté sur le statut général des fonctionnaires du groupe.
29. Le texte dispose que ceux-ci « assistent » les chefs de province, c’est évidemment une erreur.
30. On peut citer ainsi la circonscription autonome de Fort-Dauphin et celle du lac d’Alaotra.
31. En cas de vacance, les candidats de la liste à laquelle était attribué le siège vacant, sont proclamés dans l’ordre de leur présentation. En cas d’annulation globale des opérations électorales, ou si le Conseil municipal a perdu le tiers de ses membres, par suite de vacances que l’application de la règle précédente ne permet pas de combler, il est procédé dans les trois mois à des élections nouvelles. En cas d’annulation des opérations électorales dans une section ou si la section a perdu la moitié de ses conseillers, il est procédé à des élections partielles.
Toutefois, il n’est pas pourvu aux vacances survenues dans les six mois qui précèdent le renouvellement de Conseil municipal. 32. Par suite, si le Maire peut convoquer le Conseil municipal quand il le juge utile, il n’est tenu de le faire que si une demande motivée lui est faite par la moitié et non le tiers du Conseil ; il doit en aviser le chef du territoire. Pendant la session extraordinaire, le Conseil municipal ne peut s’occuper que des objets en vue desquels il a été convoqué.
Seul le chef du territoire peut abréger le délai de convocation 3 jours francs au moins du Conseil.
La même observation doit être faite à propos des règles de quorum, c’est la troisième convocation qui supprime la règle du quorum. La loi du 2 août 1949 modifiant art. 60 de la loi municipale. qui oblige les employeurs à laisser à leurs salariés, membres d’un Conseil municipal, le temps nécessaire pour l’exercice de-leur mandat n’a pas été étendue.
33. De même le décret-loi du 5 novembre 1926 n’ayant pas été étendu, la création d’un poste d’adjoint spécial ne peut être décidée que par décret en Conseil d’Etat art. 75 de la loi municipale.
34. Police de la voirie urbaine, des inhumations et cimetières, de la fidélité et de la salubrité des denrées, des fléaux calamiteux, des aliénés et de la divagation des animaux.
35. Le décret du 10 février 1937 étend à Papeete et à Uturoa par application du décret du 18 juin 1945. les dispositions de l’article 10 de la loi de 1884. Par conséquent, le Conseil municipal se compose de dix membres dans les communes de moins de 501 habitants, douze entre 501 et 1 500, seize entre 1 501 et 2 500, vingt et un entre 2 501 et 3 500, vingt-trois entre 3 501 et 10 000, vingt-sept de 10 000 à 30 000 habitants.
Ce décret abroge, en ce qui concerne l’Océanie, l’article 2 du décret du 8 mars 1879. Par suite, aucun texte ne détermine le nombre des adjoints. On peut cependant penser que l’auteur du décret de 1937 n’a voulu abroger l’article 2 du décret du 8 mars 1879 que dans la mesure où il déterminait le nombre de conseillers municipaux. Il reste valable pour le nombre des adjoints.
36. Toutefois, les élections partielles doivent se faire quand le Conseil a perdu le quart de son effectif le tiers en Nouvelle-Calédonie ; dans les six mois un an en Nouvelle-Calédonie précédant le renouvellement général, les élections partielles ne se font que si le Conseil a perdu plus de la moitié de ses membres, car la loi du 9 mars 1936 n’a pas été étendue art. 42 de la loi municipale. Par contre, le Conseil municipal fonctionne comme dans la Métropole, mais les règles de tutelle sont les mêmes que celles exposées pour Nouméa.
37. Les deux décrets du 4 avril 1957 sont similaires. Toutefois, alors que la création de ces collectivités et les mesures d’organisation non précisées par les décrets incombent en A.O.F. et en A.E.F. aux chefs de territoire en Conseil de Gouvernement après avis de l’Assemblée territoriale., à Madagascar la création incombe au chef de province en Comeil de Province après avis de l’Assemblée provinciale. et les mesures d’organisation au Haut-Commissaire en Conseil de Gouvernement et après avia de l’Assemblée représentative.


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